Mitsubishi Lancer/Sportback, mystérieuse inconnue

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2005

Le marché automobile québécois est le paradis de la petite voiture importée. Il serait donc normal que la Lancer sous toutes ses variantes soit l'un des best-sellers sur notre marché. Pourtant, ses apparitions sur nos routes sont rares. Chez Mitsubishi, cette situation s'explique par le fait que le légendaire modèle Evolution n'est pas commercialisé au Canada et cela nuit à l'image de cette voiture.

Il est vrai que l'EVO, comme il est appelé dans le jargon des mordus, est une voiture légendaire avec son moteur de 271 chevaux, et sa suspension dérivée des voitures de rallye de Mitsubishi en championnat du monde. Son absence sur notre marché s'explique par une non-conformité des pare-chocs aux normes canadiennes. Ce qui permet à Subaru de faire cavalier seul dans ce segment de la voiture à transmission intégrale à moteur survitaminé. À titre de référence, l'Impreza WRX STi est propulsé par un moteur de 300 chevaux.

Mais cette absence n'explique pas tout. Il faut également ajouter que le Lancer a remporté plusieurs accessits tant au Canada qu'aux États-Unis. Par exemple, elle a obtenu une excellente cote de sécurité par l'Insurance Institute for Highway Safety américain tandis que l'AJAC l'élisait meilleure petite voiture économique au Canada en 2003.

La mévente de cette sous-compacte est donc une autre preuve de l'incapacité de ce constructeur à se faire justice sur notre marché. En plus, il faut avouer que ce modèle est quelque peu dépassé au chapitre de la silhouette tandis que sa motorisation est parfois mal choisie. Si l'EVO excite les acheteurs des autres pays avec ses larges passages de roue, sa grosse prise d'air sur le capot et son imposant aileron arrière, le Lancer « ordinaire » fait un peu tristounet avec sa silhouette du début des années 90. Les modèles Ralliart sont un peu plus agressifs en fait de présentation, mais le fait demeure que le design est essoufflé. Et ne comptez pas sur la familiale Sportback pour améliorer les choses. Avec ses flancs plats et sa partie arrière anonyme, elle fait songer aux anciennes Chevrolet Cavalier familiales. Désolé de frapper en bas de la ceinture, mais la Sportback est tout aussi « rétro » que la berline.

Et les choses ne s'améliorent pas beaucoup au sein de l'habitacle. Là aussi, tout nous fait songer aux années 90. Les stylistes ont tenté de donner un peu de piquant à la présentation avec des cadrans à fond blanc sur certains modèles et des appliques en titane sur le module des commandes audio et de climatisation. C'est en vain puisque le tout est en net recul par rapport à presque toutes les voitures de la catégorie. Malheureusement pour ce constructeur en difficultés financières, d'autres modèles devaient être remaniés en priorité et le Lancer doit attendre son tour. Par contre, il faut spécifier que l'équipement de série est très complet par rapport au prix de vente. Une Lancer LS à boîte automatique - la seule disponible d'ailleurs - se vend pour moins de 21 000 $. Cela comprend la climatisation, le toit ouvrant, des roues en alliage et une foule d'autres accessoires. Cependant, il faut se contenter de l'anémique moteur quatre cylindres de 120 chevaux. D'ailleurs, la motorisation est sans doute le talon d'Achille de la Lancer.

Choix déroutants !

La sélection de moteur et surtout de transmission pour la Lancer n'est pas toujours appropriée. Par exemple, le modèle OZ-Rally, malgré son appellation à caractère sportif doit se contenter de la version de 120 chevaux du moteur 2,0 litres de la ES qui est plus bruyant et rugueux que performant. En fait, un seul moteur est compétitif et c'est le quatre cylindres 2,4 litres introduit l'an dernier. Son système de calage des soupapes infiniment variable permet d'obtenir une puissance de 162 chevaux sur la berline Ralliart qui peut être commandée avec une boîte manuelle à cinq rapports ou l'automatique à quatre vitesses. Curieusement, les familiales Ralliart et ES ne peuvent pas être livrées avec une transmission manuelle.

Ce qui signifie que la berline de base, malgré toutes ses qualités en matière de sécurité et son prix alléchant se fait allégrement distancer par ses concurrentes en raison de ses performances modestes, de son niveau sonore élevé, et d'une tenue de route handicapée par un sous-virage prononcé. Des pneumatiques plus gros sur la OZ-Rally améliorent la tenue de route, mais pas l'agrément de conduite.

Tenant compte du fait que les ingénieurs avaient eu plus de temps pour peaufiner la mécanique, il serait logique de croire que les modèles Sportback lancés l'an dernier pourraient faire meilleure figure à ce chapitre. Malheureusement, à part le moteur plus puissant, les choses ne se sont pas améliorées. L'équipement de la voiture est relativement complet, la capacité de la soute à bagages est importante et la finition honnête, mais l'agrément de conduite est correct sans plus. Si le moteur assure des temps d'accélération inférieurs à dix secondes, le feedback de la direction est tellement faible qu'on a l'impression que le volant est déconnecté. Il semble que ce soit le même ingénieur qui a été mis en charge des commandes de climatisation car on a la même sensation. Et il faut souligner que l'essai d'une Sportback LS en hiver a permis de démontrer que les pneus d'origine ne sont d'aucune efficacité dans la neige.

Malgré notre jugement plutôt sévère, le Lancer n'est pas une vilaine voiture, d'autant plus que la faiblesse des ventes permet à l'acheteur de négocier un meilleur prix. Par contre, face aux ténors de la catégorie que sont les Mazda3, Honda Civic, Ford Focus et Toyota Corolla, ce Mitsubishi se défend assez mal.

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