Kia Amanti, qui a menti ?

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2004

Un modèle de luxe dans la gamme Kia ! Vous pensez tous qu'ils sont fous chez ce constructeur de nous proposer une grosse berline de luxe ? Surtout qu'elle est supposée vouloir en découdre avec les Nissan Maxima, Mercury Grand Marquis et Toyota Avalon pour ne citer que quelques concurrentes espérées. Désolé de vous contredire, mais l'arrivée de cette nouvelle venue n'est pas aussi farfelue qu'il paraît au premier coup d'?il. Il faut tout d'abord reconnaître le fait que Kia n'est plus la même compagnie depuis qu'elle a été intégrée au groupe Hyundai. Jadis luttant pour sa survie et ne prêtant pas tellement attention à la qualité d'assemblage et à la fiabilité, cette compagnie entend maintenant augmenter ses parts de marché partout dans le monde. En fait, le groupe Hyundai vise le cinquième rang à l'échelon mondial. Au cours des trois dernières années, Kia a réalisé de spectaculaires progrès en termes de qualité, de fiabilité et de sophistication de ses modèles. La nouvelle Amanti s'intègre dans cette politique.

Et il faut souligner qu'une berline de même catégorie était déjà au catalogue de la marque. Il s'agissait de l'Entreprise, un modèle qui ne possédait pas les qualités nécessaires pour être distribué en Amérique du Nord. Ayant eu l'opportunité de me déplacer à bord de cette voiture en Corée, j'ai pu constater que cela aurait été un échec total. En revanche, avec l'Amanti, le succès ne relève pas de l'utopie puisque cette voiture possède quelques atouts qui la feront apprécier d'une certaine clientèle. Pour plusieurs, la possibilité de se payer le luxe d'une Mercedes au prix d'une Toyota Avalon est un argument passablement irrésistible.

Genève et New York

Le 4 mars 2003, tout le gratin de la compagnie Kia s'était donné rendez-vous au Salon de l'auto de Genève pour le dévoilement de l'Opirus, la première berline de luxe de cette compagnie destinée aux marchés internationaux. Les journalistes présents ont été quelque peu estomaqués lors de ce dévoilement en découvrant une berline dont la grille de calandre était vraiment très distincte de tout ce qui est offert. Sa forme trapézoïdale et ses ailettes chromées disposées en forme de V et traversées par une baguette centrale sont autant d'éléments qui la démarquent fortement.

À part cette grille de calandre qui est quasiment un pastiche de la grille Mercedes, il est évident que les stylistes bossant sous la houlette de Sung-dae Baek se sont inspirés de multiples caractéristiques empruntées à plusieurs voitures de luxe. Les phares avant sont d'inspiration Mercedes, le capot ressemble quelque peu à celui des Jaguar tandis que la partie arrière du toit s'apparente à la défunte Lincoln Continental. Malgré cet ADN disparate, la silhouette de la voiture affiche un petit quelque chose de sympathique. D'autres vous diront que le résultat est plutôt caricatural.

L'élément visuel le plus controversé de cette voiture est certainement sa grille de calandre. Pourtant, lors du dévoilement de la version nord-américaine au Salon de l'auto de New York en avril, cette grille avait été modifiée pour notre marché : la barre centrale perpendiculaire a tout simplement été enlevée. Un autre changement majeur est le fait que l'Opirus sera commercialisée sous le nom d'Amanti au Canada et aux États-Unis. Cette appellation est dérivée du verbe italien amare qui signifie aimer. Selon Kia, les gens vont tomber amoureux de cette berline qui leur fera également aimer la vie. Vous vous demandez sûrement ce que signifie Opirus, l'identité de cette Kia partout ailleurs. Ce mot est dérivé du nom de la ville biblique d'Ophir qui était reconnue pour ses marchés de produits de luxe et sa richesse.

Il est évident que cette voiture a été conÇue en fonction des goûts des consommateurs américains. Non seulement l'Amanti est une voiture dont le gabarit est quasiment similaire à celui d'une Mercedes de Classe S, mais son habitacle est plus grand que celui d'une Buick LeSabre. En fait, Kia affirme que le dégagement pour les jambes aux places avant est le plus important de sa catégorie. Vous pourrez utiliser cette Kia pour inviter trois de vos amis au golf puisque le coffre peut transporter quatre sacs de golf grâce à une capacité de 440 litres. De plus, les places arrière conviendront à tous les gabarits.

Comme l'extérieur, l'habitacle est truffé d'emprunts aux marques de prestige. Les commandes des sièges avant sont similaires à celles de la Mercedes et le concept du tableau de bord est influencé par celui des grosses américaines tandis que les appliques en bois véritable sur la planche de bord et l'éclairage électroluminescent des cadrans sont d'inspiration Lexus. Le volant ressemble à celui de la Lexus LS 430 avec son gros moyeu central, ses commandes en périphérie et la partie supérieure du boudin en bois. Bien assis dans un siège moelleux privilégiant vraiment le confort plutôt que le support latéral, le pilote a vraiment l'impression d'être au volant d'une berline de grand luxe.

Cette impression serait exacte si ce n'était de quelques détails de finition et de conception. Plusieurs vis apparaissent Çà et là tandis que certaines pièces en plastique sont d'une texture différente et font vraiment bon marché. De plus, tant qu'à aller dans les détails, signalons que quelques coutures sur les sièges recouverts de cuir déviaient parfois de leur course et que certaines composantes des garnitures de l'habitacle étaient mal fixées. Mais il s'agit de détails insignifiants compte tenu de la fourchette de prix de l'Amanti.

Bien entendu, faute de pedigree, cette Kia nous en donne pour notre argent par l'intermédiaire d'un équipement plus que complet. Soulignons la climatisation à commande électronique, un changeur à six CD au tableau de bord, un système antipatinage et de stabilité latérale de même que huit coussins de sécurité.

Talon d'Achille

Malgré ses freins à disque aux quatre roues, sa suspension arrière indépendante, sa boîte automatique à cinq rapports et sa suspension à contrôle électronique, l'Amanti ne réussira pas à combler la personne à la recherche d'une berline de luxe possédant un caractère sportif. Le coupable de cette situation est le moteur V6 Sigma de 3,5 litres dont les 195 chevaux sont adéquats, mais ne permettent pas de compter sur des accélérations semblables à celles des concurrentes que l'Amanti réussit à talonner en fait de silhouette et d'équipement. Il lui faut un peu moins de 10 secondes pour boucler le 0-100 km/h. C'est correct, mais les impatients devront ronger leur frein. À titre de comparaison, une Mercedes de Classe E équipée du moteur V6 3,2 litres effectue cet exercice en 3 secondes de moins. Par contre, la Toyota Avalon fait presque match nul avec la Kia.

Mais il n'y a pas que les chiffres qui importent. En conduite, les passages des rapports de la boîte automatique s'effectuent relativement lentement, ce qui ajoute à l'impression du manque de performance. Cette impression est également accentuée par la bonne insonorisation de l'habitacle et la souplesse relative des amortisseurs.

J'ai eu l'occasion de mettre à l'essai cette Kia en avant-première dans le cadre d'un voyage en Corée. Cette voiture s'est tout de même assez bien débrouillée lors d'un test réalisé sur une piste d'essai située sur les terrains de l'usine de Hwasung qui nous a permis de vérifier le comportement en virage, le freinage et l'accélération. Ma première impression a été de piloter une voiture dont la silhouette était d'inspiration européenne, la présentation de l'habitacle similaire à celle d'une Lexus LS et au comportement routier qui s'apparentait à celui d'une Buick Park Avenue.

Les temps d'accélération n'ont pas fait surchauffer mon chronomètre, mais la performance s'est quand même avérée correcte du moment qu'on accepte le fait qu'il s'agit d'une automobile privilégiant le confort et les randonnées boulevardières. D'ailleurs, la direction est quelque peu engourdie et il faut anticiper les virages serrés si on ne veut pas être obligé de corriger la trajectoire au milieu du point de corde. La suspension est souple, mais le roulis en virage est bien contrôlé tandis qu'un sous-virage marqué mais facile à dominer se manifeste si jamais votre pied droit appuie trop fort sur la pédale d'accélération dans une courbe. Il faut également se rappeler que l'Amanti est dotée d'un système de stabilité latérale, si jamais vous perdez le contrôle. Et si les freins se sont révélés progressifs et résistants à la surchauffe, ils fumaient drôlement lors de notre retour de piste.

Somme toute, l'Amanti cible surtout l'acheteur qui apprécie les grosses berlines et le confort pantouflard des nord-américaines. Cette nouvelle venue est également un moyen pour Kia de se départir de cette image de constructeur de « p'tits chars cheaps » qui lui colle au train depuis son arrivée sur notre marché.

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