Volvo S40 / V40, est-ce bien une Volvo ?

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2004

La tendance à la concentration de l'industrie automobile entre les mains de quelques gros constructeurs a conduit à un multiculturalisme croissant dans la production automobile, et la Volvo S40 en constitue l'exemple patent. Fabriquée par une société d'origine suédoise, mais qui appartient à des intérêts américains (Ford), la S40 est assemblée dans une usine des Pays-Bas, sur une base empruntée à la japonaise Mitsubishi Carisma. Faut-il se surprendre qu'elle éprouve de légers problèmes d'identité ?

Offerte en configuration berline (S40) ou familiale (V40), cette compacte justifie son prix assez élevé par un raffinement qui la situe dans le créneau d'entrée des berlines de luxe, avec tout ce que cela signifie en termes d'image, d'opulence et de comportement routier. Non seulement elle rate sa cible, mais ses places arrière étriquées l'éliminent presque d'office comme véhicule familial. Or, son tempérament tranquille et son allure effacée ne cadrent guère avec le style d'un célibataire ou d'un jeune couple. Restent les autres, qui n'ont pas besoin d'un habitacle spacieux, pour qui la sécurité constitue un critère essentiel et qui désirent s'offrir absolument une Volvo neuve.

Une voiture ancienne

Le projet s'est teinté dès le départ d'un certain flou artistique, avec le choix de la plate-forme Mitsubishi conÇue à l'intention première d'une compacte économique (la Carisma) dont les ambitions étaient forcément plus modestes que celles de la S40. En somme, le temps et l'argent ont imposé à Volvo une plate-forme qui n'avait pas toute l'intégrité souhaitable. Ajoutons que 10 années ont maintenant passé depuis sa mise en service originale, et vous aurez une idée du retard à combler.

En Amérique, où elle est présente depuis l'année 2001, elle n'offre qu'une seule motorisation : un quatre cylindres turbo basse pression de 1,9 litre qui abrite un attelage de 170 chevaux. Ses performances sont convenables, et le turbo lui confère une agréable souplesse, comme en fait foi son couple maximal atteint à 1800 tr/min, une performance hélas ! assombrie par le léger délai qui marque son temps de réaction. Sa transmission automatique à cinq rapports propose trois modes : économique, sportif et hiver, le dernier permettant de pondérer les accélérations sur chaussée glissante. Elle fonctionne avec douceur et n'a pas grand-chose à se faire pardonner, sinon de ne pas être accompagnée d'une bonne boîte manuelle qui accommoderait les conducteurs plus impulsifs.

La S40/V40 se défend assez bien sur la route grâce à sa stabilité correcte à vitesse de croisière s'il ne vente pas trop, à son comportement sans surprise et à sa direction précise, mais le tranchant de ses réactions dynamiques n'est guère affûté. Elle manifeste assez tôt sa tendance au sous-virage, et accuse un solide roulis dans les courbes. L'amortissement progressif favorise une douceur de roulement enviable, même si les suspensions peuvent cogner assez durement au passage des profondes saignées. Les freins à disque assistés de l'ABS et du répartiteur électronique de la force de freinage procurent des arrêts rectilignes mais plus longs que la moyenne. La sécurité active est complétée par un système de stabilité dynamique (DSA) qui réagit au patinage des roues motrices en y apportant le correctif approprié. Efficace, mais on préférerait un train avant accrocheur.

Le trait dominant chez la Volvo S40 réside dans sa capacité à vous emmener sur de longues distances sans vous fatiguer. La douceur de ses suspensions y est pour beaucoup, bien sûr, tout comme son habitacle bien insonorisé qui filtre efficacement les bruits du dehors, hormis quelques perturbations éoliennes se manifestant à vitesse de croisière. Mais on s'en voudrait de ne pas accorder tout le crédit qui revient aux sièges avant. Confortables, soutenants, ils réchauffent même votre postérieur en hiver. Les places arrière, on l'a dit, sont moins accueillantes en raison du faible dégagement aux jambes ; à l'inverse, le coffre est étonnamment vaste, et le volume de charge passe du simple au double dans la familiale, avec les dossiers arrière rabattus.

Un sentiment d'ennui

À l'image de sa silhouette banale, la S40 propose un habitacle dont l'aménagement, pour être fonctionnel, inspire un certain sentiment d'ennui. La présentation monotone fait suremploi de plastiques d'apparence terne, du moins dans la version de base, puisque les voitures équipées de l'ensemble LE ont droit à des matériaux plus nobles. Les accessoires de ce groupe d'options ne sont pas vendus individuellement et il vous faut prendre nécessairement l'ordinateur de bord pour avoir droit aux roues de 16 pouces, au système de stabilité et à la sellerie de cuir, ce qui de toute faÇon semble un must pour une voiture de luxe. Mais alors, son prix se rapproche dangereusement des 40 000 $, et il n'y a que le siège du conducteur qui ait les réglages électriques. Songeons à ce que l'on pourrait s'offrir ailleurs pour un déboursé semblable?

Reste l'arsenal de protection : coussins frontaux, latéraux, rideaux gonflables pour la tête, fauteuils avant conÇus pour protéger du « coup de lapin », pas d'erreur, c'est bien une Volvo, mais une Volvo datant des premiers efforts du constructeur suédois pour dynamiser sa gamme, et qui à ce titre commence à se faire obsolète. La prochaine génération devrait voir le jour dès l'an prochain, sur une plate-forme que partagerait la Ford Focus, et éventuellement une Mazda. Encore la mondialisation. Attendez donc de voir ce qu'elle nous réserve?

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