Peter Schreyer et le nouveau design KIA

Séoul, Corée du Sud-
Au cours d'une récente visite de journalistes canadiens chez KIA en Corée du Sud, Peter Schreyer s'est prêté à une longue entrevue que nous vous présentons ici.

Q : Chez KIA, vous utilisez souvent des noms pour désigner vos véhicules alors que les constructeurs européens emploient plus souvent des désignations alpha-numériques. Pourtant avec les nouvelles Optima et Cadenza, on retrouve la désignation K5 et K7 sur ces modèles. Quelle est votre préférence personnelle pour appeler les voitures?

Peter Schreyer : Personnellement, je crois que cette question s’applique au département du design mais je préfère que vous l’adressiez aux gens du marketing, il existe présentement des divergences d’opinion sur ce sujet au sein de la haute direction…

Q : Si vous regardez votre parcours jusqu’à maintenant, croyez-vous avoir réussi à imprimer votre style sur les modèles de la gamme?

Peter Schreyer : Je crois qu’avec les nouveaux modèles K5, K7 et Sportage il existe maintenant une filiation évidente entre ces véhicules, et qu’un style propre à la marque KIA est bien établi. De plus, la gamme de véhicules à été considérablement remaniée et le travail se poursuit ce qui fait que très bientôt nous aurons une marque qui a beaucoup évoluée.

Q : KIA est une marque très jeune, si on la compare à des marques établies qui ont beaucoup d’histoire et qui utilisent encore et toujours des éléments de style qui leurs sont propres côté design. Comme vous avez la responsabilité d’instaurer le style KIA pour les années à venir, quels sont les éléments de style qui vous sont maintenant propres, quelle est la signature visuelle de KIA?

Peter Schreyer : Vous savez que BMW et Audi n’ont pas toujours eu leur look actuel, il s’agit d’une évolution, et chez KIA il est également question d’évolution dans un processus continuel, mais je crois que nous avons déjà accompli beaucoup et je crois que si vous regardez nos plus récents modèles, vous pouvez voir une sorte d’ADN de la marque. L’élément le plus important est le « visage » formé par la calandre qui permet d’identifier la voiture comme une KIA au premier coup d’œil, et ce qui est important pour moi c’est que nos voitures ne portent pas d’éléments purement « cosmétiques » ou décoratifs, le design KIA est plutôt simple ce qui, paradoxalement, est parfois plus difficile à réaliser, et je crois que la K5 est un bon exemple d’un design simple mais également très expressif qui est unique et remarquable. C’est plus une question de proportions, de surfaces, de relation entre la carrosserie et le vitrage, des éléments comme ceux-là…

Q : Ayant maintenant établi le visage de KIA, est-ce que cela rend votre travail plus difficile? Si vous étiez chez BMW, vous seriez obligé d’intégrer la calandre aux deux naseaux et le « Hofmeister Kick » ce qui fait qu’une grande partie du design est en quelque sorte pré-déterminée, est-ce que cela vous limite dans votre travail?

Peter Schreyer : Je crois qu’il est difficile d’établir un « visage », une signature visuelle quand la marque n’a pas beaucoup d’histoire. Chez BMW, cette signature est présente depuis les tous débuts, ils l’ont toujours utilisée et ne s’en sont jamais défaits. Mais pour moi, ce fut difficile de trouver quelque chose d’expressif et d’unique qui peut évoluer dans l’avenir en devenant plus longue ou plus large ou de l’utiliser d’une nouvelle façon. Je crois qu’il est maintenant très utile de pouvoir compter sur cette calandre qui a été difficile à définir mais qui ne présente pas maintenant un problème justement parce que nous l’avons…

Q : D’ici à deux ans tous les modèles de KIA auront été redéssinés, quel sera alors votre principal défi? Aurez-vous alors accompli tout ce que vous voulez?

Peter Schreyer : Non, comme je l’ai dit précédemment, c’est un processus en constante évolution. Nous travaillons déjà sur le design des générations subséquentes de véhicules qui viennent tout juste de s’ajouter à la gamme. C’est un travail qui n’a jamais vraiment de fin, on n’arrive jamais au point où l’on peut dire que maintenant tout est terminé, c’est un défi continu qui sera encore et toujours présent le jour où je prendrai ma retraite et qui sera alors relevé par d’autres.

Q : Au cours des derniers jours que nous avons passés en Corée du Sud il a beaucoup été question de l’évolution de la marque et du fait qu’elle doit progresser vers les voitures de performance et les créneaux plus haut-de-gamme. En tant que designer, existe-t-il des éléments de style que vous croyez importants pour établir cette appartenance aux véhicules haut-de-gamme?

Peter Schreyer : Sur cette question, il y a deux éléments. Le premier est : êtes-vous une marque haut-de-gamme ou non? Je crois que KIA est sur la voie d’être plus que simplement une marque de véhicules abordables et de devenir une marque « premium », mais on ne peut pas devenir une marque « premium » du jour au lendemain, ce doit être le reflet d’une progression. Ce fut le cas pour Audi et c’est plus que simplement une question de design, il faut aussi prendre en considération les éléments techniques, et c’est un processus qui est plus long. Si vous dites du jour au lendemain que vous êtes une marque « premium », les clients ne vous suivront pas. La K5 est un bon exemple, ses proportions, ses phares et feux arrières et surtout ses bandes de chrome assez uniques qui partent du pilier « A » pour suivre la ligne du toit et aboutir à la fin de la lunette arrière, le fini « piano » sur les « ouïes » latérales et sur la calandre. Tous ces éléments contribuent à donner à la voiture un « look » de voiture plus chère qu’elle ne l’est réellement.

Q : Lorsque vous commencez le travail sur un nouveau modèle, faites-vous un concours entre les différents studios de design de la marque?

Peter Schreyer : Oui. Chez KIA, nous avons trois studios de design à Namyang en Corée, à Irvine en Californie et à Francfort en Allemagne et, dans la plupart des cas, ils se retrouvent en compétition l’un contre l’autre ce qui nous permet d’avoir des points de vue différents. Il est parfois très difficile de choisir entre ces différentes approches. Par exemple, dans le cas de la K5, l’intérieur a été conçu par le studio californien, l’extérieur par le studio de Francfort, et dans le cas du Sportage ce fut l’inverse.

Q : Si vous aviez le choix de créer un modèle « phare » pour la marque, une voiture d’image, quel type de véhicule serait-ce?

Peter Schreyer : Je crois qu’une voiture de type cabriolet, ouverte au monde extérieur serait le meilleur choix. Un petit roadster cadrerait parfaitement avec la vocation de KIA…

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