Ce que la Première guerre mondiale a apporté à l'automobile moderne

Qu’on le veuille ou non, il n’y a rien comme une guerre, aussi injuste et meurtrière soit-elle, pour faire évoluer la technologie... C’est vrai aujourd’hui comme c’était vrai il y a 100 ans alors que l’automobile commençait à envahir les routes.

Il y a exactement 100 ans aujourd’hui, le prince héritier austro-hongrois François-Ferdinand est assassiné à Sarajevo par le nationaliste serbe Gavrilo Princip. C’est l’étincelle qui mène au déclenchement de la Première Guerre mondiale (28 juin 1914 – 11 novembre 1918). Il s’agit de la première guerre d’importance à être mécanisée. C’est en effet au cours de ce conflit que sont utilisés les premiers chars d’assaut et les premiers avions de combat. Des véhicules blindés avaient déjà été employés mais jamais autant que durant cette Première Guerre mondiale. Les tacticiens des différentes armées qui ont cru à la motorisation de leurs troupes avaient compris qu’on ne pouvait plus gagner seulement au corps-à-corps. La mobilité devenait impérative, au risque de devoir l’inventer. L’amiral britannique John Arbuthnot « Jacky » Fisher (1841-1920) n’avait-il pas décrété que « la guerre sera gagnée par les inventions »?

Entre 1914 et 1918, la technologie fait des bonds de géant et elle marque le début de plusieurs nouvelles armes (chars d’assaut, zeppelins, gaz empoisonnés, sous-marins, mitraillettes), et d’avancées importantes dans les domaines de la radiocommunication – pour communiquer avec ces nouvelles armes ou leurs pilotes – et l’électricité pour les contrôler.

Les premiers tanks

Le premier tank est britannique (Mark I, dévoilé en 1915), le second, selon ce que j’ai pu trouver, est français et ce n’est nul autre que Renault qui le construit (FT-17, produit entre 1917 et 1918). On était encore loin de la sophistication des chars d'aujourd'hui mais à l'époque le message était clair: la guerre devenait mobile et le règne de la baïonnette achevait.

Les débuts de l’aviation militaire et des communications en vol

Avant le début de ce premier conflit, l’avion existait depuis à peine une dizaine d’années. Mais pour répondre aux nouveaux besoins (reconnaissance, distances plus grandes, vols plus hauts pour éviter les tirs de grenade – à la main! – transport de bombes lourdes), les ingénieurs des différents pays participant au conflit doivent développer de nouvelles technologies (matériaux plus légers, moteurs plus performants, synchronisation de la mitrailleuse avec l’hélice etc.). Les vitesses atteintes ne demandent pas encore d’études aérodynamiques poussées, mais les avions de la fin de la guerre sont nettement plus évolués que ceux qui l’ont commencé. Les avancées technologies de l’aviation mèneront à de véritables engins de guerre lors du prochain conflit mondial, lesquels conduiront aux supersoniques et par la suite, dans une certaine mesure, à la conquête de l’espace.

Si communiquer par la parole tout en conduisant fera un jour partie de notre quotidien, les choses sont bien différentes en 1914. À ce moment, l’avion devient militaire et il est impératif de transmettre des informations aux pilotes et d’en recevoir d’eux. Sinon, il s’agit d’actions ponctuelles, sans grand impact. Au début du développement de cette technologie (Guglielmo Marconi 1874-1937) et Nikola Tesla (1856-1943), seuls des messages télégraphiques peuvent être envoyés et reçus sur une distance quand même impressionnante de 140 milles (225 km). En 1917, grâce aux avancées de l’électricité, un pilote parle enfin de vive voix à un technicien au sol.

La démocratisation du 4x4

La Première Guerre mondiale marque aussi le véritable début des véhicules hors route. En 1893, un ingénieur britannique, Bramah Joseph Diplock, patente un véhicule doté de quatre roues directrices et de trois différentiels! Quelques années plus tard, Ferdinand Porsche, en collaboration avec Lohner fabrique une voiture à quatre roues motrices. D’autres inventeurs donnent également dans l’intégralité. C’est lors du conflit 1914-1918 que les 4x4 marquent leurs vrais débuts avec les quelque 15 000 exemplaires fabriqués par FWD (Four Wheel Drive, à ne pas confondre avec Front Wheel Drive!). Nash et Daimler, pour ne nommer que ces deux-là, fournirent aussi leur part de véhicules à quatre roues motrices. Déjà, les avantages de la motricité intégrale sont reconnus. Le Jeep ne le sait pas encore mais il est déjà en gestation!

L’armée sur deux roues

La motocyclette a été développée parallèlement à l’automobile. En 1914, elle est donc déjà passablement évoluée. Durant la Première Guerre mondiale, elle sert surtout aux messagers, aux missions de reconnaissance et à la police militaire. Indian, Harley-Davidson et Triumph sont d’ardents fournisseurs de motos, appréciés pour la fiabilité de leurs produits. L’expérience acquise pendant ce conflit leur servira admirablement bien après, sauf pour Indian qui avait tellement consacré d’énergie à l’effort de guerre qu’il avait pris du recul sur Harley-Davidson. Ces marques existent encore d’ailleurs.

Première crise du pétrole

Déjà, ce premier conflit provoque ce qu’on pourrait appeler la première crise du pétrole. Depuis le milieu des années 1800, le pétrole est devenu indispensable. Tout d’abord pour illuminer et chauffer les habitations. Cependant, l’électricité naissante est une véritable menace pour l’industrie pétrolifère. Une porte se ferme, une autre ouvre… L’automobile apparait et, avec elle, la promesse de millions de barils de pétrole à vendre chaque jour. Puis vient la guerre. Même si elle se déroule principalement en Europe, ce sont les Américains qui fournissent 80 % du pétrole utilisé là-bas. Avec l’augmentation exponentielle du nombre de voitures sur les routes des États-Unis et des véhicules militaires de toutes sortes en Europe, la demande est plus forte que l’offre. À tel point que le gouvernement américain déclare le « Gasolineless Sundays » (Dimanches sans essence). Que se passe-t-il quand la demande excède l’offre? Les prix grimpent radicalement. Malgré cela, le pétrole remplace lentement mais sûrement le charbon comme carburant, pas nécessairement dans les voitures, mais dans les centrales thermiques et dans les habitations.

L’automobile, héros de guerre

L’automobile profitera d’innombrables améliorations à la suite des avancées technologiques menées entre 1914 et 1918. Cependant, son plus grand pas, elle le fait au niveau psychologique en devenant un héros de guerre, quasiment au même titre que les soldats. Ce grand pas, elle le fait les 6 et 7 septembre 1914 en France. C’est que les Allemands ne sont qu’à quelques kilomètres de Paris dans le département de Seine-et-Marne et il faut de toute urgence envoyer des troupes. Seule solution possible dans les délais imposés : l’utilisation de véhicules à moteur. Oui, mais où trouver 1 300 voitures pouvant transporter chacune cinq soldats? En faisant appel à une flotte de taxis! Ces taxis, en majorité des modèles Renault, permettent aux soldats d’arriver sur place à temps… mais pas de remporter la bataille. En fait, la quantité de soldats, des réservistes pour la plupart, fut négligeable, car plusieurs divisions avaient déjà été acheminées par train. Malgré tout, la population se rend compte de « l’utilité » d’une guerre motorisée. Ce que sera d'ailleurs la prochaine guerre mondiale, une guerre totalement mécanisée.

Vous venez de lire une très brève énumération de ce qu’une guerre, débutée il y a 100 ans, a pu amener comme améliorations au niveau technologique et même sociologique. Il y a eu suffisamment d’avancées, dont nous sommes aujourd’hui les héritiers, pour continuer pendant des heures. Notez que je ne suis pas un historien et qu’une visite dans un musée ou la lecture de livres ou de sites internet sérieux vaut cent fois plus qu’un si court texte sur une période aussi sombre mais si effervescente de l’Histoire.

Voici quelques liens intéressants: www.mentalfloss.com, www.ieeeghn.org, www.shmoop.com Ces sites sont surtout dédiés à la technologie mais il en existe beaucoup d'autres très bien documentés sur tous les aspects de la Première Guerre mondiale.

Ce texte a été écrit en collaboration avec Denis Duquet.

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