Le défi de vendre des véhicules au Canada

Tout récemment, je mettais à l’essai la familiale Toyota Crown Signia, dont le comportement routier est fort intéressant. De notre côté de la frontière, elle n’est offerte qu’en une seule version, Limited, au coût de 60 400 $. Nos voisins du Sud profitent pour leur part d’une version XLE à compter de 44 985 $, ainsi que de notre Limited, vendue là-bas à 49 385 $.

Faites la conversion, et vous verrez que Toyota vend chez nous sa Crown Signia Limited pour une somme inférieure à celle d’une version XLE américaine. En effet, au moment d’écrire ces lignes, 44 985 USD convertis en dollars canadiens font  64 268 $. Et pour la Limited? Pas moins de 70 560 $. Vous venez donc de comprendre pourquoi Toyota ne vend que sa mouture la plus coûteuse chez nous. Parce que face aux véhicules vendus aux États-Unis, la profitabilité n’y est pas.

Naturellement, les frasques de Donald Trump nuisent à notre dollar. Et les conséquences sont catastrophiques, dans toutes les sphères d’activités. Dans le monde automobile, l’impact sera tel que l’on risque de plus en plus de voir disparaître les modèles abordables. Certains constructeurs pourraient même choisir de bouder notre marché, préférant vendre leur production là où la profitabilité est plus grande.

Photo: Toyota

Cette semaine, un autre exemple flagrant de cette triste réalité nous a sauté au visage. Le tant attendu Subaru Forester à technologie hybride, qui ne se déclinera chez nous qu’en version Premier, alors que les Américains bénéficieront de quatre moutures très attrayantes et donc en mesure de rivaliser avec l’actuel Toyota RAV4, lequel est assemblé au Canada en quatre déclinaisons hybrides. Or, il faut s’attendre à ce que le Forester hybride (que l’on baptisera e-Boxer au Canada) soit vendu à plus de 50 000 $, tandis qu’un Forester hybride américain (Premium) pourrait débuter à environ 35 000 USD. Quant à la plus luxueuse des versions américaines, on estime sa facture à environ 43 000 USD, ou autour de 61 500 CAD.

Subaru Canada explique la situation en évoquant l’importance d’augmenter le nombre de véhicules à motorisation hybride sur le marché américain (en raison des normes qui diffèrent des nôtres). Mais en vérité, ce n’est principalement qu’une question de gros sous. Et c’est compréhensible.

Photo: Subaru

Des exemples comme ceux-là, il en existe des dizaines. En particulier lorsque les véhicules sont assemblés aux États-Unis. Ne vous demandez pas pourquoi la Honda Accord se vend aujourd’hui au compte-goutte. S’il en est ainsi, c’est parce qu’elle est assemblée en Ohio, et que de la vendre en dollars canadiens engendrerait une perte financière pour le fabricant. Ou du moins, une très faible profitabilité, surtout sur les modèles d’entrée de gamme, que le constructeur ne propose d’ailleurs plus sur notre marché.

Si Ford a mis autant de temps à rendre disponible sa camionnette Maverick, c’est en raison de la forte demande américaine face à un marché canadien où les profits n’y étaient pas. Aujourd’hui, on peut certes l’obtenir plus facilement, mais sachez que la Maverick hybride XL vendue 26 900 $ en 2022 coûte maintenant 35 995 $. Littéralement 25% de plus, alors qu’en argent américain, ce véhicule est étiqueté à 27 960 $ (39 935 CAD).

Photo: Ford

Comprenez ainsi que peu importe où vous jetez un œil sur la planète, il n’existe pas d’autres endroits dans les pays industrialisés où le prix de vente des véhicules est plus bas qu’au Canada. Nous avons l’impression que les constructeurs explosent les prix de leurs véhicules depuis quelques années, ce qui n’est pas faux. Or, avec la faiblesse de notre dollar, c’est ici, au Canada, que la profitabilité est la moins élevée pour un manufacturier. Et bien qu’il soit difficile de le croire, certains véhicules encore proposés chez nous sont même vendus à perte. Pas pour le concessionnaire, mais pour le constructeur, qui préférerait certainement réduire son offre. Or, vient ensuite l’impact pour les réseaux de concessionnaires, que l’on n’a pas besoin d’étouffer davantage, dans le contexte économique actuel.

Vous direz peut-être que les concessionnaires ne font pas pitié. Et c’est vrai. Car de nos jours, la plupart des concessionnaires appartiennent à des réseaux, voire à des empires. Ceux-ci font néanmoins face à d’importants défis, tels l’exportation rendue très difficile, le retrait des crédits gouvernementaux, et bientôt l’impossibilité de vendre des produits comme la garantie de remplacement ou l’assurance vie/invalidité, de même que le support d’un inventaire dont la valeur grimpe en flèche. Bref, si vous payez plus cher, c’est pareil pour les concessionnaires.

À voir aussi : l'essai complet de la Toyota Crown Signia

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