Dodge Charger Daytona 1969 : de la piste à la route

S'il ne devait rester qu’un seul essai routier réalisé par Jacques Duval, ce serait probablement celui de la Dodge Charger Daytona. Le reportage où il dévale les grandes courbes du circuit Mont-Tremblant à toute allure dans l’émission Prenez le Volant a marqué toute une génération…et demeure très populaire aujourd’hui (voir plus bas). Après l’émission de télévision, le fondateur du Guide de l’auto a évidemment écrit un essai routier dans l’édition 1970. Cela dit, on ne peut pas dire qu’il soit très élogieux (voir son avis à la fin du texte).

Il faut dire que cette voiture, à l’allure très particulière n’a pas été dessinée ainsi par hasard. Son long museau aérodynamique et son gigantesque aileron n’ont qu’un seul but : remporter des courses et le titre NASCAR. Plus chères que les Charger « normales » et affublées d’une carrosserie loin de faire l’unanimité, les Daytona n’ont pas connu un grand succès à leur sortie. Ce qui en fait de véritables licornes, dont les prix peuvent dépasser le million de dollars selon le moteur, l’état de la voiture et son historique.

Photo: Julien Amado

Sous le capot, deux V8 étaient disponibles : le 440 Magnum ou le 426 Hemi. Il était possible de les associer à une boîte manuelle à 4 vitesses ou une automatique à 3 rapports. Notre modèle d’essai, magnifiquement restauré en 2017-2018, est doté du V8 440 et de la transmission automatique. Un choix de moteur conseillé par Jacques Duval à l’époque, le 426 Hemi étant trop typé course en vue d’un usage routier.

Au premier abord, la longueur du capot étonne, avec ce grand nez plongeant. La hauteur de l’aileron en impose aussi. Ajoutez la couleur orange éclatante et vous comprenez pourquoi on ne passe pas inaperçu à son volant!

Photo: Julien Amado

À l’intérieur, la classicisme de l’habitacle tranche radicalement avec l’extérieur. C’est très sobre, avec beaucoup de noir, même si les sièges mixtes vinyle/tissu (une option très rare) apportent un peu d’originalité à l’ensemble. Au moment de prendre place à bord, la finesse de la jante du volant nous rappelle que l'on est dans une voiture conçue dans les années 60. Les cadrans qui font face au conducteur sont lisibles, mais l'ambiance n'est pas vraiment sportive...

Photo: Julien Amado

Au démarrage, le V8 se cale gentiment sur son régime de ralenti. La sonorité est plaisante, ni trop feutrée, ni trop envahissante. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la Daytona n’a rien d’une furie incontrôlable. Le V8 440 est doux comme un agneau à bas régime et s’accommode très bien d’une conduite coulée. Sa puissance est évidemment moindre que le 426 Hemi (375 chevaux contre 425) mais la différence est beaucoup plus ténue en ce qui concerne le couple (480 lb-pi au lieu de 490). Cela se remarque d’ailleurs tout de suite à la conduite, les 7,2 litres de cylindrée garantissant des accélérations soutenues dès les plus bas régimes. La poussée n’est pas fulgurante et diminue après 4 500 tr/min. Mais attention, la vitesse grimpe tout de même vite sur l’indicateur…

Photo: Julien Amado

La précision de la direction est similaire aux américaines de l’époque, c’est-à-dire aléatoire et les petits freins à disques n’incitent pas vraiment à l’attaque. Mais l’agrément de conduite est bel et bien là, et le roulement très confortable donne envie d’avaler les kilomètres à son volant. Peu importe qu’on la trouve belle ou laide, la Charger Daytona a acquis ses lettres de noblesse depuis longtemps dans le monde de l’automobile de collection.

Nous comprenons que Jacques Duval l’ait trouvée peu pertinente au moment où elle est sortie, car il n’était pas possible de prévoir que sa cote d’amour et sa valeur grimperaient autant. Loin d’être un monstre inconduisible, une Daytona à moteur 440 est un coupé très agréable pour des promenades dominicales agrémentées de quelques accélérations plus soutenues…à condition de pouvoir s’en offrir une!

L’avis de Jacques Duval dans le Guide de l’auto 1970 :

« À notre avis, il n’existe pas d’auto aussi peu élégante sur le marché. C’est même assez monstrueux et plutôt grotesque. Si au moins ce bricolage était proprement exécuté, ce serait certes moins frappant. On dirait que c’est du « fait à la maison »…Il est également difficile semble-t-il, de peindre une voiture moitié métal, moitié fibre de verre, puisque notre Daytona de couleur or était d’au moins quatre teintes différentes. Les pneus sont montés sur des roues très ordinaires et il n’y a même pas de compte-tours au tableau de bord. Le volant est celui d’une Plymouth normale et convient peu à un tel bolide. Le moteur de 426 pouces cubes n’est pas un exemple de silence. Son bruit sera toutefois agréable au conducteur sportif. Ce moteur a le ralenti de celui d’une voiture de course et n’est pas bien adapté à la circulation en ville. Il surchauffe d’ailleurs très facilement. La transmission automatique est excellente et le changement des vitesses s’effectue très rapidement. La tenue de route n’est pas renversante. L’avant cherche à sortir des virages et les pneus fument de manière alarmante. Elle penche beaucoup dans les courbes. À moins que vous ne soyez intéressés à devenir le futur Richard Petty ou David Pearson, ou à être le centre d’attraction dans les rencontres de « drags », nous ne voyons pas comment une telle voiture pourrait vous être utile, surtout à 7 000 $ (55 000 $ aujourd'hui). En d’autres termes, regardez, mais ne touchez pas…»

Nous voulons remercier chaleureusement Denis St-Cyr pour le prêt de sa magnifique Charger Daytona.

À voir aussi : essai de la Charger Daytona Hemi 1969 par Jacques Duval

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