Jaguar XJ8 I XJR I Vanden Mas 1998 : Quand élégance rime avec performance
Il n'y a pas si longtemps encore, les berlines produites par Jaguar misaient davantage sur la finesse de leurs cuirs et leurs appliques en bois exotique que sur leurs performances routières. La voiture affichait toujours cet air de belle dame anglaise qu'il ne fallait pas brusquer. Si jamais on oubliait ses bonnes manières avec ces voitures, elles s'offusquaient et tombaient en panne.
Si cette perception a toujours cours auprès du public, les choses ont drôlement changé à Coventry depuis que Ford a pris les rênes du pouvoir. Non seulement les Jags sont devenues plus fiables, mais la dernière cuvée impressionne également au chapitre de la conduite. En fait, cette marque nous démontre une vitalité qui lui était inconnue jusqu'à ce jour. Il y a quelques années à peine, cette prestigieuse compagnie se contentait de proposer un nouveau modèle par décennie et le délai était parfois plus long. Maintenant, chaque année nous amène une nouveauté. Cette ère a débuté en 1995 alors qu'on a dévoilé une version entièrement repensée de la XJ.
Plus esthétique, mieux construite et vraiment plus homogène, cette berline a marqué le vrai retour en force de la marque. L'année suivante voyait l'arrivée d'une version à empattement long suivie 12 mois plus tard par la remplaçante de la XJS. Devenu XK8, ce coupé/cabriolet étrennait un nouveau moteur V8 d'une conception entièrement moderne. Pour 1998, c'est au tour de la berline XJ6 d'abandonner son moteur 6 cylindres pour le V8 du coupé. Elle devient donc la XJ8 et la X.IR est de retour. Cette fois, le moteur qui bénéficie des muscles additionnels fournis par le compresseur n'est plus un 6 cylindres en ligne, mais le V8 4,0 litres. Le bilan de l’opération se traduit par une moteur de 370 chevaux!
Avant d'analyser plus en détail ces deux modèles, il faut prendre quelques lignes pour analyser la fiabilité des modèles produits par Jaguar. Pendant longtemps, cette marque était reconnue autant pour le caractère raffiné de ses voitures que pour leur fiabilité problématique. Chaque nouvelle version devait toujours nous faire oublier les malheurs du passé avant de nous décevoir par la suite. Là encore, la tradition n'est plus respectée chez Jag. Depuis quelques années, les nouveaux modèles ont démontré une fiabilité qui fait le bonheur des propriétaires. D'ailleurs, les classements de satisfaction de la clientèle et de la fiabilité produits par l’incontournable firme californienne J.D. Powers & Associates le prouve. En 1989, Jaguar se classait au 31e rang au chapitre de la satisfaction de la clientèle. En 1997, elle est 5e, un bond spectaculaire. Et pour faire bonne mesure, on s'empresse d'ajouter que la valeur résiduelle de ces voitures a grimpé de 11 p. 100 en cinq ans.
Il est donc possible d'envisager l'achat d'une Jag sans avoir des sueurs froides à la seule pensée de sa valeur de revente crainte d'être victime de nombreuses pannes.
Un tandem presque idéal
Un élément qui n'a pratiquement jamais été critiqué chez Jaguar est la qualité du châssis et de la suspension. Ces berlines ont toujours été en mesure de combiner une tenue de route supérieure à une suspension calibrée en fonction du confort. Malgré tout, les ingénieurs ont profité de l'arrivée d'un nouveau groupe propulseur pour moderniser les suspensions avant et arrière. Celles-ci sont étroitement dérivées du coupé/cabriolet XK8 dévoilé l'an dernier. La suspension avant fait appel à des leviers triangulés dotés de bras inégaux, tandis que les ressorts hélicoïdaux sont montés sur la membrure transversale. A l'arrière, on fait également appel à des leviers triangulés doubles tandis que les arbres de couche font partie intégrante de la suspension en agissant à titre de levier supérieur.
Il est également important de souligner que la carrosserie est plus rigide en flexion et en torsion afin de pouvoir tirer le meilleur parti possible de cette nouvelle suspension plus moderne et plus sophistiquée que celle de la XJ6. N'empêche que l'élément clé de cette voiture est son moteur V8 4,0 litres. Grâce à ses 290 chevaux, il permet de gagner 45 chevaux par rapport à la version régulière de l'ancienne XJ6. Mais il y a plus que la puissance supplémentaire. Ce moteur est de conception très moderne tout en étant léger et compact. Il faut également ajouter qu'il possède un accélérateur relié au moteur par un système de contrôle électronique. Il forme un tandem très efficace avec la boîte automatique ZF à 5 rapports héritée de la XK8 qui bénéficie d'un nouveau convertisseur de couple en 1998. Le levier de vitesses est de retour avec sa grille d’élection en «J», mais le mécanisme a été révisé.
L'arrivée de ce nouveau V8 rend la berline encore plus agréable à piloter. Non seulement les accélérations s'effectuent en douceur, mais elles sont passablement incisives. C'est ainsi que le 0-100 km/h est bouclé en 7,3 secondes, un gain de 1,5 seconde par rapport à a XJ6 1997. De plus, quand on utilise le sélecteur de vitesses en mode manuel, les reprises du moteur sont vraiment énergiques. Impressionnant sur autoroute, le comportement routier perd de son aplomb sur des routes sinueuses en raison de la trop grande souplesse de la suspension. La direction est juste assez assistée pour convenir à une berline de luxe, sans pour autant être trop déconnectée de la route. Et l'assistance variable en fonction de la vitesse est vraiment proportionnelle, de sorte que les modifications sont graduelles et totalement imperceptibles contrairement à ce qui est le cas chez certaines berlines japonaises de la même catégorie.
L'arrivée d'un nouveau moteur dans un modèle déjà en production n'est pas toujours la solution idéale. Toutefois, dans le cas de la XJ8, cette opération s'est révélé une amélioration marquée. Malgré tout, force est d'admettre que la XJR est encore plus spectaculaire.
Plus puissante qu'une Corvette
L’an dernier, la XJR impressionnait avec ses 322 chevaux. Cette fois, c'est une cavalerie de 48 chevaux additionnels qui piaffe sous le capot. Et pour mieux transmettre cette puissance à la route, la « R » est chaussée de Pirelli P-Zero de 18 pouces, des P255/40ZR18 pour être plus précis. La surface de contact avec le bitume n'est certainement pas négligeable. Compte tenu du couple très élevé de ce moteur, la boîte ZF de la version atmosphérique ne pouvait être utilisée, ce qui explique la présence d'une boîte de vitesses automatique Mercedes-Benz à 5 rapports utilisée dans les modèles à moteur V12 de la firme allemande. Selon David Scholes, ingénieur en chef chez Jaguar, la collaboration entre les deux compagnies a été excellente. Soulignons au passage que cette boîte est sur le marché depuis quelques mois chez Mercedes et qu'elle s'est révélée aussi fiable qu'efficace.
Si la XJ8 assure une conduite agréable et plaisante, la XJR fait de même mais de façon plus musclée. Il faut moins de 6 secondes pour boucler le 0-100 km/h et les reprises sont dignes des meilleurs coupés sport. Le plus surprenant est le confort de la suspension pour une voiture équipée de pneus de 18 pouces à taille large. Comme avec la XK8, les Pirelli P-Zero font des merveilles autant pour la tenue de route que pour le confort.
La présentation de ces nouvelles Jaguar s'est effectuée sur les routes tortueuses de la Virginie entourant la ville de Washington, D.C. Non seulement cette berline de luxe a démontré une étonnante agilité sur ces routes, mais elle nous a permis de prendre les virages serrés à grande vitesse sans broncher. Il faut noter que la suspension de ce modèle est plus rigide que celle de la XJ8. Cependant, Jaguar limite la vélocité maximale de la XJR à 249 km/h et celle de la XJ8 à 241 km/h, ce qui permet à la plus puissante des deux de demeurer la plus rapide.
La nouvelle XJR permet donc de concilier performances, luxe et environnement légèrement rétro pour constituer un tout unique en son genre.
La silhouette demeure
Si Jaguar n'a pas hésité à envoyer son vénérable moteur 6 cylindres aux oubliettes, la silhouette vraiment unique de cette voiture n'a pas été modifiée. On a bien fait quelques légères retouches à la carrosserie, notamment aux feux arrière et à la partie avant de la caisse, mais c'est très discret. Par contre, on remarque un petit écusson V8 placé sur le pilier «B». Les 4 phares circulaires ainsi que les rondeurs de la caisse donnent à cette voiture un air rétro qui lui sied fort bien. Quant à la version Vanden Plas, plus luxueuse, elle propose toujours le même rebord de calandre cannelé qui permet de la reconnaître immédiatement. Elle se distingue aussi par son empattement allongé, lequel n'est pas disponible sur la X18.
En fait, les grands changements visuels ont été relégués à l'habitacle dont le tableau de bord est sérieusement revu. La présentation quasiment ésotérique de l'ancienne planche de bord n'est plus. Cette fois, on a adopté une présentation plus conventionnelle: les instruments sont placés dans trois cercles percés à travers une applique de bois. C'est plus moderne d'allure, mais les cadrans sont relativement difficiles à lire le jour. De plus, les commandes des clignotants, du régulateur de vitesse et de l'essuie-glace sont simplifiées et plus faciles d'accès. Une montre analogique trône en plein centre de la planche de bord, délimitant le territoire des deux buses de ventilation. Toutefois, le seuil de porte est élevé et il faut lever les pieds d'une bonne quinzaine de centimètres pour sortir de la voiture. Et, malheureusement, on trouve toujours ce félin bondissant dont les deux pieds sont soudés au capot qui fait «bébelle» sur une voiture de cette catégorie.
Les XJ8 et XJR sont indubitablement les meilleures berlines que Jaguar n’ait jamais produites. Et, cette fois, elles ont de bonnes chances de tenir le coup plus longtemps que quelques semaines.
CARACTÉRISTIQUES
Échelle de prix: 76 900$ à 92 900$
Modèle/Prix: XJ8 / 77 900S
Type: berline / propulsion
Empattement : 287 cm
Longueur: 502,4 cm
Largeur: 180 cm
Hauteur: 134 cm
Poids: 1813 kg
Coffre/Réservoir: 360 litres /81 litres
Coussins de sécurité: conducteur, passager et latéraux oui
Système antipatinage: oui
Suspension av./arr.: indépendante
Freins av./arr.: disque ABS
Direction: à crémaillère, assistance variable
Diamètre de braquage: 12,1 mètres
Pneus av./arr.: P225/60ZR16
Valeur de revente: bonne
Garantie de base: 4 ans / 80 000 km
MODÈLES CONCURRENTS
- Mercedes Benz 5420
- Lexus 15400
- Infiniti Q45
POUR
- Moteurs adaptés
- Boites de vitesses robustes
- Fiabilité en progression
- Comportement routier impeccable
- Silhouette élégante
CONTRE
- Espace du conducteur limité
- Cadrans difficiles à lire
- Seuil des portes élevé
- Coffre moyen
- Suspension trop souple
VERDICT
Agrément: 3.5/5
Confort: 4/5
Fiabilité : 3.5/5
Habitabilité: 3.5/5
Hiver: 3.5/5
Sécurité: 4/5
MOTORISATION ET PERFORMANCES
Moteur/Transmission: V8 4,0 litres / automatique 5 rapports
Puissance/Couple:290 ch à 6100 tr/min / 290 lb-pi à 4250 tr/min
Autre moteur: V8 4,0 litres 370 ch (XJR)
Transmission optionnelle: aucune
Accél. 0-100 km/h: 7,3 secondes autre moteur 5,8 secondes
Vitesse maximale: 241 km/h (limitée)
Freinage 100-0 km/h: 40,2 mètres
Consommation (100 km): 14,3 litres autre moteur: 15,7 litres
QUOI DE NEUF?
Moteur V8
Suspension révisée
Tableau de bord modifié
Freins plus puissants
Disparition du V12
Coussrions de sécurité latéraux




