Bombardier B12 1947, l'autobus des neiges

Joseph-Armand Bombardier nait en 1907, à Valcourt en Estrie. Durant son enfance et son adolescence, le jeune Bombardier fait preuve d’une remarquable curiosité pour tout ce qui touche la mécanique. Sa passion l’amènera à créer des véhicules capables de se mouvoir sur la neige.

Mais pour se mouvoir sur la neige, il faut un système spécialement adapté… qui n’existe pas à cette époque! Bombardier y consacrera sa vie. En 1935, après des années de recherche et de perfectionnement, menées sur le principe « essais et erreurs », il élabore un système de chenille qui s’améliore au point où une production en série est envisagée.

Le Ford Model T pour débuter

Il s’agit du système appelé barbotin-chenille. Une roue dentée en caoutchouc (le barbotin) entraîne la chenille, constituée de traverses en métal reliant deux bandes de caoutchouc. La surface de portée ainsi créée est suffisamment importante pour que le poids du véhicule soit bien réparti, ce qui lui permet d’avancer dans la neige sans s’embourber. Au début de ses essais, Joseph-Armand utilise un Ford Model T pour se rendre compte que le moteur doit être placé à l’arrière, là où sont les roues motrices, ce qui assurerait une meilleure traction dans la neige.

Des chenilles, c’est bien. Un véhicule pour utiliser ces chenilles, c’est encore mieux! Le premier véhicule qui se sert efficacement du système barbotin-chenille est le B7 qui peut transporter sept personnes. Il s’agit de l’ancêtre du B12 qui, lui, en transporte cinq de plus. D’ailleurs, ce système de barbotin-chenille était si bien pensé qu’il est encore présent sur les motoneiges modernes! Le principe des chenilles est connu depuis plus longtemps encore que le système de Joseph-Armand Bombardier. Cependant, il s’agissait de chenilles rigides employées surtout sur les chars d’assaut ou sur les béliers mécaniques. En plus d’être très lourdes et d’être peu efficaces dans la neige, ces chenilles étaient peu fiables.

La force du système barbotin-chenille de Bombardier vient de sa simplicité et de son efficacité. Puisque la chenille est souple et qu’elle est ouverte, la neige ne peut pas s’accumuler entre les traverses, ce qui évite de taxer inutilement la mécanique. Les roues de commande sont faites d’acier recouvert de caoutchouc, rendant ainsi le système plus doux, donc plus « confortable ». De plus, ces roues sont indépendantes de la suspension. Elles ne bougent pas, ce qui assure constamment une efficacité maximale.

Un B12 en Estrie

Ces véhicules auraient pu tomber dans l’oubli… Mais c’était sans compter sur un passionné comme Charles Bouchard, d’Eastman, pas très loin de Valcourt. Amateur depuis toujours de voitures anciennes, l’Estrien se passionne pour les autoneiges de Bombardier depuis une quinzaine d’années. Le B12 qu’il possède aujourd’hui avait été vendu neuf à un médecin de Saint-Jérôme. Il faut expliquer que les véhicules de Bombardier étaient souvent vendus à des professionnels ayant à se déplacer régulièrement et quelquefois rapidement. Il faut avouer que son prix d’environ 1 500 $ le mettait hors de la portée de plusieurs bourses.

Charles Bouchard a acquis son B12 en 2002, après dix années de recherche. Il était dans un bel état et aucune pièce ne manquait. Il était même matching number, c’est à dire qu’il possédait son moteur, son châssis et sa carrosserie d’origine. Pourtant, sa restauration a demandé beaucoup de courage… et de temps! Trois ans ont été nécessaires pour décaper la peinture grise qui recouvrait l’habitacle et rendre au bois son grain original. Les pièces sont assez faciles à trouver puisque la mécanique provient de chez Chrysler.

Mécanique Chrysler

Le moteur est un six cylindres en ligne flathead de 251 pouces cubes Chrysler T-120. D’ailleurs, la véritable appellation du B12 de Charles est B12 C.S. pour Chrysler Special. Ce moteur développe 215 chevaux et beaucoup de couple. La transmission manuelle à trois rapports « à colonne » provient aussi de chez Chrysler. Le B12 (et son comparse B7) pouvait « rouler » à plus de 30 mph (48 km/h) sur la neige, ce qui était très rapide à cette époque. Charles, lui, roule souvent à 20 ou 25 mph. Le dessous du B12 est recouvert d’une plaque de tôle courbée, ce qui fait office de toboggan et qui lui permet de flotter, littéralement, sur la neige.

À la fin des années 40, le gouvernement du Québec oblige les municipalités à déneiger leurs routes, ce qui fait dramatiquement chuter la production des fameux snowmobiles B7 et B12. Heureusement, le créatif Joseph-Armand Bombardier adapte son système barbotin-chenilles à d’autres véhicules dont des tracteurs. L’entreprise crée aussi des véhicules industriels comme le Muskeg ou les dameuses de pistes de ski.
Aujourd’hui, Bombardier est présent dans une quarantaine de pays et œuvre autant dans le transport sur rails que dans l’aéronautique. Les produits récréatifs font désormais partie d’une autre entreprise créée 2004, BRP (Bombardier Recreative Products).

Mon pays, ce n’est pas un pays, c’est l’hiver…

Même si le B12 de Charles Bouchard a plus de 60 ans, il continue de faire tourner les têtes. Lors d’expositions ou d’activités spéciales, les enfants comme les personnes âgées retrouvent le sourire lorsqu’ils voient cet autobus des neiges. Imaginez quand ils y montent!

Si vous désirez voir ce B12, ou mieux y faire une promenade, vous pourrez rencontrer Charles au Grand Prix de Valcourt le 18 février de midi à 16 heures au musée, à Waterloo (Fête des neiges) le lendemain aux mêmes heures. Puis, à Saint-Élie-d’Orford (encore pour une Fête des neiges!) le 1er mars. Vous pourrez aussi voir de beaux véhicules à Saint-Raymond-de-Portneuf du 11 au 13 février et à Saint-Roch-de-Mékinac à la pourvoirie Hosanna, entre autres. En fait, il existe plusieurs activités impliquant des motoneiges anciennes et des snowmobiles partout au Québec.

Partager sur Facebook

Plus sur le sujet

Voitures anciennesMusée J. Armand Bombardier: L'automobile sur la neige
Aujourd’hui, tous les « vieux » le confirment, on n’a plus les hivers qu’on avait! Avec le passage du temps et la fascination de l’Humain pour le grandiose, les tempêtes de neige d’antan sont devenues des cataclysmes, les froids faisaient tellement descendre le mercure qu’il fallait le ramasser au sol …

À lire aussi

Et encore plus

En collaboration avec nos partenaires