Les difficultés de rouler en électrique

De plus en plus de Québécois adoptent l’auto électrique, une bonne chose car la province vise à interdire la vente de véhicules uniquement à essence d’ici 2035. Réduire la dépendance aux énergies fossiles et les émissions de gaz à effet de serre est une excellente chose, mais qui dit nouvelle technologie, dit nouvelles réalités. De l’achat à l’utilisation au quotidien, voici les difficultés dont il faut tenir compte.

1 – Des délais qui font perdre patience

La pénurie de véhicules électrique décourage de nombreux acheteurs potentiels. Pour certaines marques, les clients qui ont passé commande il y a deux ans reçoivent actuellement leurs voitures. Même si la situation a tendance à s’arran­ger, les délais de fabrication et de livraison restent longs. Les spécialistes croient qu’il faudra encore quelques années au marché automobile pour rat­traper son retard.

2 – Les prix restent un frein è l’achat

Plus de la moitié des Canadiens (58%) qui prévoient d’acheter un véhicule dans les cinq prochaines années aimeraient qu’il soit plus écologique, mais 42% finiront par opter pour une voiture à essence en raison des prix plus élevés des modèles électrifiés. C’est ce que révèle un sondage de KPMG. Les raisons qui vont pousser les acheteurs à se contenter d’un véhicule à essence sont les prix élevés (26%), l’anxiété liée à l’autonomie et aux infrastruc­tures de recharge (14%), ou encore les listes d’attente et délais de livraison (8%).

« Le sondage indique que la récession et les taux de financement nettement plus élevés ont fait naître un certain pragmatisme: le consom­mateur opte pour ce qui est dis­ponible plutôt que d’attendre le véhicule «qui changera sa vie» », a expliqué Damiano Peluso, associé et leader national Auto­mobile de KPMG au Canada.

3 – L’autonomie, source de stress

La question numéro un qui revient lors de l’achat d’une automobile électrique est l’autono­mie. Et chez nous, il faut tenir compte d’une réalité qui a un fort impact sur les batteries : le froid.

Dans certains cas, on peut observer une perte d’autono­mie allant jusqu’à 40%.

Photo: Germain Goyer

Les raisons sont multiples. À basse température, le transfert d’électrons est moins rapide dans la batterie et le système de gestion de la voiture utilisera plus d’énergie pour maintenir une température de fonction­nement optimale. Vient ensuite la consommation électrique plus grande pour le chauffage.

Alors qu’un véhicule à combus­tion récupère principalement la chaleur du moteur, un véhicule électrique utilise l’énergie de la batterie pour chauffer l’habitacle.

Heureusement, il existe des moyens corriger en partie ces problèmes. D’abord, lorsque le véhicule est stationné, la recommandation des construc­teurs est de le laisser branché sur une borne de recharge par temps de grands froids (en deçà de -20 degrés), et ce, peu importe le niveau de charge. Ensuite, le conducteur peut activer sur le tableau de bord les paramètres de préchauffage afin de conditionner la batterie et l’habitacle avant le départ.

Sur la route, on pourra favo­riser les sièges chauffants et le volant chauffant afin de diminuer le chauffage. Enfin, depuis quelque temps, cer­tains véhicules proposent des pompes à chaleur. Ceci dit, tous les modèles ne sont pas égaux. Certains résistent mieux que d’autres aux baisses de température.

4 – Le temps de recharge variable

Il s’agit d’un nouveau paramètre à prendre en compte pour gérer ses déplacements. En théorie, calculer le temps de recharge d’une voiture électrique est fort simple. En effet, il suffit de diviser la capacité de la batterie du véhicule, notée en kilowattheure (kWh) par la puissance de la borne en kilowatt (kW), puis on obtient le temps requis. Comme démonstration, prenons une Chevrolet Bolt 2023 avec une batterie de 65 kWh. Voici le temps requis pour recharger cette voiture en entier à partir d’une batterie vide sur différents types de bornes de recharge:

-Prise résidentielle de 120V avec fusible dédié de 15 ampères (1.4 kW) : 46 heures et 26 minutes

-Borne de recharge 240V de niveau 2 (7.2 kW à 30 ampères) : 9 heures et 2 minutes

-Borne de puissance intermédiaire (24 kW) : 2 heures et 42 minutes

-Borne de recharge rapide (50 kW) : 1 heure et 18 minutes

Photo: FLO

Simple, non ? En théorie oui, mais en pratique pas vraiment. La recharge rapide est contrôlée par le système de gestion de recharge du véhicule (BMS). Le BMS fixe le courant de recharge selon des critères de température, de voltage des cellules de batterie, de niveau de charge etc. Il en résulte une courbe de puissance variable selon la température et le temps. Typique­ment, la puissance va monter rapidement suite au branchement initial, puis, passé un certain niveau de charge, va commencer à décroître.

Il faut noter que tous les BMS ne sont pas programmés de la même manière. De plus, plusieurs fabricants offrent maintenant le pré-conditionnement de la batterie : pen­dant que le véhicule roule, le système utilise de l’énergie pour réchauffer la batterie à un niveau autorisant une vitesse de recharge optimale.

En plus, la bonne nouvelle est que sur les autoroutes québécoises, il est dorénavant plus commun de rencontrer une borne de recharge rapide du Circuit Électrique qu’un restaurant Tim Hortons.

5 – L’utilisation en ville, un casse-tête?

Que se passe-t-il lorsque l’on se retrouve dans une situation où il est impossible d’installer une borne de recharge quand on vit en apparte­ment et que l’on doit stationner son véhi­cule dans la rue? Cela dépend beaucoup de l’autonomie totale du véhicule et du kilométrage annuel du conducteur.

L’infrastructure de recharge ayant évolué à un point où il n’est plus requis de traîner avec soi une rallonge de 30 mètres (!), voyons quelles sont les principales options qui s’offrent aux conducteurs sans station­nement fixe.

-Recharge avec une borne de rue : il y en a plus de 1 000 rien que sur l’île de Montréal! On retrouve également des bornes sur rue dans les parcs de station­nement de plusieurs arrondissements, ces dernières pouvant être particuliè­rement pratiques lors des opérations de déneigement. Elles sont environ 350 à Québec. Néanmoins, il y a quelques inconvénients. D’abord, il y a l’obliga­tion de débrancher son véhicule si l’on ne veut pas payer l’utilisation une fois la recharge terminée. Ensuite, il faut le déplacer, et cela peut être ardu le soir dans certains quartiers.

-Recharge au travail : certaines com­pagnies offrent à leurs employés des subventions liées au programme « Roulez Vert » et installent des bornes de recharge.

-Recharge au centre commercial : beau­coup de commerces proposent des bornes de recharge à leur clientèle.

Photo: Louis-Philippe Dubé

6 – L’assurance pourrait coûter plus cher

Dans certains cas, en passant de l’essence à l’électrique, votre prime d’assurance pourrait augmenter, selon les recherches du Guide de l’auto. Ce qui paraît contre-intuitif. Il existe quatre raisons qui l’expliquent:

-La complexité pour un assureur de pouvoir honorer ses obligations suite à un sinistre, considérant la rareté des véhicules électriques sur le marché. Il en va de même pour la disponibilité des pièces.

-Deuxièmement, le coût de ces dites pièces est généralement plus élevé que pour une voiture à essence.

-Il existe un risque lié aux techno­logies de conduite semi ou entière­ment autonome, plus généralement installées sur des véhicules élec­triques. Si l’accident est causé par une défaillance de la technologie et non pas en raison d’une erreur humaine, le conducteur et donc l’as­sureur demeurent responsables.

-Il y a la question de la décontami­nation en cas d’incendie. Non pas que les voitures électriques brûlent en plus grand nombre, mais parce que lorsqu’il y a incendie, les coûts de décontamination du site sont démesurément plus élevés qu’avec une voiture à essence, une batterie au lithium émanant des éléments extrêmement toxiques.

7 – Plus facilement une perte totale

Une enquête récente de l’agence de presse Reuters révèle que les assureurs doivent déclarer de plus en plus de voitures électriques en pertes totales, même après des accidents mineurs. Un dommage, même minimal, à la batterie peut le rendre complètement inutilisable. Comme la batterie est le com­posant le plus cher d’une auto électrique, plusieurs d’entre elles finissent déclarées perte totale. Sachant qu’aujourd’hui le recyclage des batteries est encore un sujet épineux, nous pourrions potentiellement assister à une augmentation du gaspillage.

Photo: Tesla

À voir aussi : Top 10 des véhicules électriques les moins chers en 2023

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