General Motors Ultralite : ajouter de la légèreté

Un véhicule concept destiné à tester des solutions avancées de réduction de la consommation qui se retrouve vedette d’un gros film d’action, ce n’est pas courant. Pourtant, ce fut le destin de l’Ultralite!

Dès le début des années 90, la pression environnementale se fait sentir chez les constructeurs automobiles. Pour General Motors, cela amènera à la présentation du concept Impact entièrement électrique en 1990 (qui deviendra la EV1 en 1996). Mais pour réduire la consommation de ses véhicules, le manufacturier  travaille aussi d’autres types de trains roulants ainsi que sur de nouveaux matériaux.

C’est qui l’ennemi?

Le poids, évidemment! C’est pourquoi GM développe l’Ultralite, un prototype destiné à tester de nouvelles solutions en matière d’allègement. Les ingénieurs conçoivent une structure en fibre de carbone qui ne pèse que 191 kilos. Il faut se rappeler que nous sommes en 1992 et que ce matériau est encore extrêmement exotique et principalement réservé à des modèles de compétition. Le châssis est fabriqué par Scaled Composites, une compagnie spécialisée dans les composites pour l’aviation (fondée en 1982, elle appartient aujourd’hui au groupe Northrop Grumman). Grâce à la rigidité de la fibre de carbone, le pilier central peut être supprimé, permettant l’installation de deux portes intégrales à ouverture papillon.

Photo: General Motors

Les lignes, signées Jim Bieck sous la direction du vice-président au design Chuck Jordan, sont tout en rondeur. Les phares utilisent des solutions innovantes (pour 1992) : fibres optiques à l’avant et DEL à l’arrière. Grâce à un travail poussé en soufflerie, l’Ultralite offre un Cx de 0,192 (pour comparaison, la Lucid Air Dream, l’une des voitures les plus aérodynamiques aujourd’hui sur le marché, fait 0,21). Une suspension pneumatique permet d’abaisser le véhicule à des vitesses autoroutières.

Le moteur est un 3 cylindres deux-temps de 1,5 litre développant 111 chevaux. Il est couplé à une boîte automatique à 4 rapports à contrôle électronique provenant de chez Saturn. Malgré cette puissance réduite, l’Ultralite peut réaliser le 0 à 100 km en 8 secondes et atteindre une vitesse de pointe de 217 km/h. L’ensemble mécanique, incluant la climatisation, est monté sur un berceau amovible et ne pèse que 80 kg. GM envisage que l’utilisateur pourrait simplement changer de moteur en concession pour de grosses révisions et repartir presque immédiatement. Cela permettrait aussi d’installer des motorisations à énergie alternative. La corporation évoque une turbine à gaz, un moteur électrique ou au propane. Cependant, rien n’ira plus loin.

Photo: General Motors

Les larges portes s’ouvrent sur un habitacle simple. Pas de rembourrage pour les 4 sièges individuels, lesquels font plutôt appel à un tissu ajouré pour le support. L’instrumentation est réduite au minimum : grand compteur de vitesse devant le conducteur et les autres informations au centre, sous le pare-brise. Quatre coussins gonflables sont installés.

L’Ultralite est présentée au Salon de l’auto de Détroit 1992. Finalement, le véhicule ne pèse que 635 kilos tout en offrant l’habitabilité d’une Chevrolet Corsica (qui pèse, elle, 1 175 kilos). Grâce à cela, l’EPA certifie le prototype à 88 mpg (soit 2,67 L/100 km) en moyenne et GM soutient qu’elle peut atteindre la barrière psychologique des 100 mpg (soit 2,35 L/100 km) en vitesse stabilisée à 50 mph (80 km/h). Une production limitée est envisagée mais l’Ultralite, à cause de sa structure en carbone, aurait été vendue à un prix stratosphérique (problème que rencontrera Volkswagen avec sa XL1 en 2013). À la place, GM commencera le développement de la EV1. Mais ceci est une autre histoire…

Photo: General Motors

Stallone!

Une fois fini le tour des salons, les concepts vont dans les voûtes des constructeurs ou, pire, sont détruits... L’Ultralite connaîtra une seconde vie grâce au producteur Joel Silver. L’homme derrière des films d’action comme Commando, L’arme fatale, Piège de cristal ou Predator cherche un véhicule pour son nouveau film, Demolition Man (Le destructeur), se déroulant en 2032 avec Sylvester Stallone pour héros. Le projet circule à Hollywood depuis quelques années et les autos, qui doivent être futuristes, sont l’une des difficultés empêchant la réalisation. Lorsque Silver voit le concept GM en couverture de Popular Mechanics, il décide que ce sera elle la patrouilleuse de son film. Il contacte le fabricant et, après quelques négociations, les deux tombent d’accord. GM fournira l’Ultralite en plus de 15 autres concepts et d’un exemplaire de présérie de l’Oldsmobile Aurora, prévue pour 1995. Tout le reste du film montre également des produits d’origine GM : des Hummer H2 au début et une superbe Oldsmobile 4-4-2 W30 1970 rouge pour épauler le héros, John Spartan.

Photo: Warner Bros. / Silver Pictures

Le problème est que la production a besoin de plusieurs Ultralite pour les patrouilleuses de San Angeles, mais GM n’en a qu’une sous la main. Onze véhicules additionnels seront fabriqués par Bob Graham (spécialiste de la construction automobile pour Hollywood) avec l’aide de l’un des designers originaux, Steve Small. Évidemment, pas question de fibre de carbone. Un châssis tubulaire en acier est recouvert de panneaux de fibre de verre. La suspension pneumatique est remplacée par des ressorts classiques et le moteur deux-temps disparaît au profit de blocs plus traditionnels. Un éclairage d’appoint est ajouté ainsi qu’un dôme sur le toit, qui fait penser aux LIDARS utilisés par les prototypes de véhicules autonomes. À l’intérieur, des écrans sont greffés et le volant habituel est substitué par un modèle rétractable, toujours pour la conduite autonome.

L’ensemble de la construction reviendra à deux millions de dollars, une part non négligeable du budget du film (évalué à 77 millions). Mais l’opération donnera une belle visibilité à GM car le long-métrage, sorti en octobre 1993, engendrera 159 millions de dollars de recettes à travers le monde.

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