Vous souvenez-vous de la… Saab 9-2X?

Ça sentait le désespoir quand le constructeur suédois a présenté celle qui prendra rapidement le nom de « Saabaru ».

Et ça s’est confirmé par la suite…

Une relation difficile

La fin des années 80 est une période paradoxale pour Saab. Si les ventes se portent bien, la marque commence à douter de son avenir à cause de son statut de petit constructeur dans un paysage automobile qui se consolide à grands pas.

Fâchée de ne pas avoir pu mettre la main sur Jaguar (qui ira à Ford pour 2,6 milliards de dollars US) en 1989, General Motors se rabat sur Saab et en acquiert 50% pour 600 millions de dollars US. Les 50% restants seront achetés en 2000 pour la somme de 125 millions de dollars US… ce qui en dit long sur la dégringolade de la marque durant les années 90. Le constructeur n’arrivera à faire des (petits) profits qu’en 1994, 1995 et en 2001. L’intégration du fabricant dans l’empire GM sera houleuse, la corporation ne sachant trop quoi faire de Saab et les Suédois ne voulant rien lâcher de ce qui fait leur spécificité.

Photo: Saab

La descente

Le lancement au millésime 2003 de la deuxième génération de 9-3 n’a pas eu l’effet escompté et GM recommence à se demander quoi faire avec Saab. Bob Lutz, le vice-président responsable du développement produit, observe ce qu’il se passe en Europe. Les constructeurs de luxe descendent de segment : Audi a introduit sa deuxième génération d’A3, Mercedes renouvelle ses Classe A et BMW s’apprête à dévoiler la Série 1. Voilà un marché où Saab pourrait aller chercher de la croissance. Mais pas question de commencer à partir d’une feuille blanche!

C’est là que Lutz se dit que Subaru, dont GM possède alors 20%, pourrait fournir une base idéale avec son Impreza. Et puis, Saab avait déjà eu un clone dans sa gamme dans les années 80 avec la Saab Lancia 600, dérivée de la Lancia Delta de première génération, produite en Italie de 1980 à 1982. Et c’est ainsi que la Saab 9-2X arrive au Canada et aux États-Unis pour le millésime 2005, uniquement avec une carrosserie à 5 portes.

Photo: Saab

Le jeu des 7 différences

La 9-2X a beau arborer une calandre typiquement Saab, elle ne trompe personne quant à ses origines. Elle est d’ailleurs produite sur les mêmes chaînes d’assemblage que l’Impreza, dans l’usine de Yajima, au Japon. La partie arrière est aussi revue : nouveaux feux, déplacement de la plaque d’immatriculation du pare-chocs vers le hayon, aileron intégré au hayon et… c’est pas mal tout. À l’intérieur, la console centrale est modifiée avec un fini métallique.

Photo: Saab

Les ingénieurs ont tenté tant bien que mal de distinguer la Saab de la Subaru en améliorant l’insonorisation (supports moteurs revus, matériaux insonorisants supplémentaires et tapis plus épais), en installant un boîtier de direction plus direct (provenant de la STI) et en révisant les suspensions (ressorts plus fermes, amortisseurs plus souples, coussinets plus rigides).

Deux versions sont proposées. La 9-2X Linear vient avec un 4 cylindres boxer de 2,5 litres développant 165 chevaux et un équipement décent (roues de 16 pouces, climatisation, régulateur de vitesse, condamnation centrale , rétroviseurs électriques, sellerie deux tons). La finition Aero bénéficie quant à elle du 2,5 litres turbo provenant de la WRX (227 chevaux) et ajoute à sa liste d’équipements une prise d’air sur le capot, un embout d’échappement chromé, des antibrouillards, des roues de 17 pouces (au Canada), un système audio à 6 haut-parleurs et changeur 6 CD, le volant gainé de cuir et les sièges sport chauffants.

Toutes deux viennent avec une boîte manuelle à 5 rapports de série tandis qu’une boîte automatique à 4 rapports est disponible. Parmi les options, au Canada, la Linear peut recevoir un ensemble Temps froid, un ensemble Premium (qui met son équipement au niveau de l’Aero, ensemble Temps froid obligatoire) alors que la seule option sur l’Aero est la sellerie en cuir (hormis la peinture métallisée, en option sur les deux finitions). Elle n’a pas droit aux phares à xénon, comme aux États-Unis, ni au contrôle de stabilité, aux sièges électriques ou bien à un système de navigation.

Photo: Saab

Oui mais non…

À son lancement, la Saab 9-2X est appréciée pour sa transmission intégrale permanente, sa tenue de route, son insonorisation et son moteur vivant (Aero). Les plastiques de l’Impreza ne font par contre pas très luxueux et la suspension reste très ferme. Cependant, le plus gros problème, c’est qu’elle ne trompe personne et que le déficit d’image est simplement béant. Pourtant, les prix sont relativement compétitifs (28 950 $ CDN pour la Linear et 37 735 $ pour l’Aero, en comparaison une Volvo V50 T5 est étiquetée à 38 620 $ et une Subaru WRX 5 portes à 35 495 $).

Pour 2006, les puissances sont revues à la hausse (175 chevaux sur la Linear, 230 chevaux pour l’Aero) et les ensembles d’options sont légèrement modifiés. L’accueil froid de la clientèle n’a pas encouragé Saab à développer le modèle… d’autant que GM se départit en octobre 2005 de ses 20% dans Subaru. La 9-2X ne connaîtra pas un millésime 2007.

Saab aura écoulé 10 322 exemplaires au total. Les ventes au Canada seront anecdotiques avec 1 038 exemplaires immatriculés (168 sur l’année calendaire 2004, 493 en 2005, 357 en 2006 et 20 véhicules restants en 2007/2008).

Alors, la 9-2X était-elle une mauvaise voiture? Non, à moins que vous ne considériez l’Impreza une mauvaise voiture. Par rapport à sa cousine japonaise, elle avait l’avantage d’offrir un tantinet plus de raffinement. Malheureusement, c’était trop peu trop tard pour une marque qui n’arrivait pas à se trouver. Bob Lutz aura un peu plus de chance avec le VUS 9-7X, dérivé de l’Oldsmobile Bravada, mais guère… La crise financière de 2008 et la faillite de GM en 2009 finiront de sceller le destin de Saab. Mais ceci est une autre histoire…

Aparté : la Cadillac BLS

Ironiquement, c’est la situation inverse qui s’est présentée en Europe. GM, voulant y faire percer la marque Cadillac, s’est servi de la Saab 9-3 comme voiture donneuse pour en faire la Cadillac BLS. Esthétiquement, elle reprend les arêtes tranchantes du style Cadillac de l’époque (baptisé  Art & Science) et l’intérieur est légèrement modifié. Pour le reste, elle utilise toute la partie technique de la 9-3 (y compris les motorisations diesel, indisponibles en Amérique du Nord). La BLS est présentée en 2006 et une version familiale est ajoutée en 2007 (une première pour Cadillac, avant la CTS Sport Wagon de 2010). Proposée initialement en Europe, elle sera aussi commercialisée au Moyen-Orient, au Mexique, en Afrique du Sud et en Corée du Sud. Elle se vendra encore moins bien que la 9-2X, avec moins de 7 500 exemplaires écoulés, avant de disparaître à la fin du millésime 2009. Quant au nom BLS, il est en accord avec la nomenclature Cadillac de l’époque (CTS, DTS, STS) mais certaines mauvaises langues prétendent que cela veut dire « Bob Lutz Special »!

En vidéo: notre essai souvenir de la Saab 9-3 2009

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