Dossier Tesla - Entrevue avec Jacques Duval

Le Guide de l'auto a choisi cet automne de consacrer un dossier spécial à un constructeur nouveau dans le domaine automobile qui fait beaucoup jaser à travers la planète: Tesla Motors. L'avenir de l'auto se cristallise dans ce projet fou d'un milliardaire excentrique: la voiture électrique, l'électronique, la manière de produire, les besoins du public, etc.  Parmi les gens interrogés, nous avons voulu avoir l'opinion du chroniqueur automobile Jacques Duval qui vit aux premières loges de l'évolution automobile depuis cinquante ans. Mieux encore, il est lui-même passé à la voiture électrique, maintenant propriétaire d'une Volt et d'une Tesla.

Voici la retranscription de notre discussion.

Question — Que représente Tesla dans le monde automobile?
Jacques Duval — « Actuellement, Tesla représente l’objectif de ceux qui s’intéressent à la cause environnementale. C’est l’admiration de tous les acheteurs. On veut accéder à Tesla. Tous les jours on me dit, “j’ai hâte d’avoir les moyens”, ou encore, “j’attends la version plus petite”. »

C’est une aspiration, à mon avis.

Question – Racontez-moi votre premier essai d’une Tesla
Jacques Duval – J’ai essayé cette auto grâce à mon ami Richard Petit, propriétaire de QuébecSon et collectionneur de voitures. Il aurait dû être normalement le dernier individu à s’intéresser à une Tesla parce que c’est un amateur de bolides, puissants et exotiques. J’ai pu brièvement conduire sa Tesla sur la rue Saint-Denis au printemps 2013 et ç’a été le coup de foudre. Je trouvais qu’elle avait les performances d’une Porsche, le luxe d’une Mercedes, le plaisir de conduire d’une BMW. Bref, on retrouve en une seule auto tout ce que l’on peut aimer dans une voiture quand on est un fanatique de voitures.

J’en ai commandé une immédiatement.

Question – Avant de l’essayer, aviez-vous un apriori particulier?
Jacques Duval — Non, parce que j’avais été beaucoup impliqué avec sa devancière, la Fisker Karma. J’étais allé chez un concessionnaire en Floride à l’hiver 2013 et j’avais vraiment été emballé. J’en avais fait un article. J’avais écrit que Tesla s’était fait battre au poteau par Fisker parce qu’il avait sorti sa voiture avant. Sauf qu’il a sorti une voiture imparfaite au point de faire faillite...

Tesla arrive ensuite avec une voiture qui est au point. Elle est même nommée voiture de l’année, la mieux cotée dans l’histoire de Consumer Reports, etc. Je trouvais qu’elle avait une bonne tenue de route, des accélérations phénoménales. Bref, elle avait tout ce que j’aime dans une automobile.

Au début je ne l’ai pas achetée par conviction environnementale mais par goût de quelque chose de différent et de très performant mais qui en plus avait la qualité d’être électrique. Je me suis convaincu que c’était un bon achat car en plus on ne payait pas d’essence.

La réflexion environnementale est venue plus tard. J’ai commencé à lire énormément sur le sujet. Je me suis renseigné et j’ai vu que les commentaires étaient extrêmement positifs. Il n’y avait rien de négatif au sujet de la voiture. Comme les gens de Tesla étaient excessivement indépendants, à l’époque comme aujourd’hui, il n’était même pas question d’avoir une voiture d’essai pour une semaine. Il fallait vraiment leur faire confiance.

À la lumière de ce que l’on disait sur Elon Musk et ses projets antérieurs, il y avait vraiment de quoi admirer le type et son travail!

Question – Quelle différence faites-vous entre Tesla (premier startup auto aux États-Unis depuis Chrysler en 1925) et le reste des constructeurs automobiles?
Jacques Duval — Je me pose des questions et je n’arrive pas à trouver de réponses. Comment ont-ils fait pour construire une voiture qui n’a fait l’objet d’aucun rappel majeur quand les géants de l’industrie comme GM ou Toyota sont ensevelis sous une pile d’infractions et de rappels très importants qui mettaient en danger la vie des gens? Comment Tesla a pu lancer sa voiture sans faire la moindre erreur de parcours?

Je trouve ça colossal et je le dis encore aujourd’hui, ce qui est un peu mon cheval de bataille, comment se fait-il que GM et tous les autres soient incapables de construire une voiture parfaite?

Je place Tesla dans une niche à part parce qu’il a réussi à ne pas succomber à tous les malaises qui touchent les autres constructeurs.

Question – La raison pourrait-elle se trouver dans la nature même de la compagnie? Une immense PME centralisée?
Jacques Duval — Oui. Le fait qu’il y ait un retard avec le Model X, c’est que le patron est très pointilleux et chatouilleux et ne laisse rien passer. Il n’est pas assis dans son bureau à donner des ordres. Il met la main à la pâte et s’occupe de son affaire. Ailleurs, il s’agit de comités de direction avec un président qui vient de chez Hewlett-Packard ou autre et qui n’a aucune expérience véritable dans l’automobile. Il a une expérience des affaires et ça donne… ce que ça donne!

Question – Comment voyez-vous le Model 3? Est-ce que c’est un game changer dans l’industrie auto?
Jacques Duval — Je ne le sais pas. Je pense que Tesla va rester ce qu’il est : un constructeur de niche spécialisé dans de bonnes voitures électriques. Je ne pense pas que c’est le Model 3 qui va changer la face du monde et qui va pousser la VÉ à de nouveaux sommets. Il va confirmer l’excellence du produit et augmenter les chiffres de vente.

Par contre, Tesla n’a pas l’ampleur nécessaire en termes d’usines de montage contrairement aux autres compagnies. Il va falloir plus que l’arrivée du Model 3 pour faire une entaille dans la réputation et les chiffres de vente des autres compagnies.

On voit l’intérêt des gens. Je donne beaucoup de conférences ces temps-ci, comme plus tôt cette année à Rivière-des-Prairies pour Équiterre et Branchez-vous. 150 personnes s’étaient déplacées par un bel après-midi ensoleillé pour venir m’écouter parler de voitures électriques. Il y a un engouement extraordinaire.

Tesla est un peu le conte de fées de l’industrie automobile!

Visite de l'usine Tesla

Les essais de Marc Lachapelle

Un dossier complet sur Tesla

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