Talisman : la nouvelle sportive de Daniel Campagna

SANAIR, Saint-Pie-de-Bagot – Daniel Campagna s’est fait discret depuis qu’il a quitté la direction de la firme qui porte encore son nom et fabrique toujours la plus connue de ses créations, le T-Rex. C’était il y a plus de neuf ans et il n’a jamais cessé de travailler depuis ce jour-là. Les idées, ça ne s’arrête pas comme ça : « Je ne suis pas sûr que je vivrai assez vieux pour faire tout ce que j’ai dans la tête! » dit-il en riant.

Au fil des années, Campagna a fabriqué une série de prototypes dans son atelier de Plessisville. Des machines différentes du T-Rex, le trois-roues dont nous avions présenté le prototype comme le « croisement entre une voiture de formule et une moto sportive » dans un premier contact exclusif publié dans le Guide de l’auto édition 1990.

Il a cependant mis de côté ses autres projets et consacré les deux dernières années à concevoir et fabriquer une sportive minimaliste qu’il a baptisée Talisman. Une machine à quatre roues, cette fois, qui sera réservée aux circuits à cause du cout d’homologation faramineux de tout ce qui ressemble à une voiture pour la conduite sur route. Même scénario pour les Felino CB7 et Magnum MK5, deux sportives québécoises qui sont présentées dans le Guide de l’auto 2015.

Une pure sportive accessible

La production du Talisman s’amorcera bientôt dans les ateliers de DC Compétition, la nouvelle entreprise qu’a lancée Campagna avec son indéfectible associé, Jean Gosselin. L’objectif est de l’offrir à environ 22 000 $, sans moteur.

Le prototype est équipé d’un quatre cylindres en ligne à simple arbre à cames en tête de 1,8 litre et 140 chevaux. Il s’agit d’un moteur de type R18 comme celui qu’on trouve sous le capot de la voiture la plus populaire au Québec, la Honda Civic, depuis le lancement de la huitième génération en 2006. Un groupe solide et fiable dont on pourra facilement trouver un exemplaire en bon état et à bon prix au Québec.

Même en y ajoutant le cout d’un moteur, le Talisman sera nettement moins cher que les Felino, Magnum, Ariel Atom et semblables. DC Compétition a par ailleurs l’intention de l’offrir éventuellement moteur inclus.

Campagna nous a invités à découvrir et conduire l’unique prototype de son Talisman au complexe Sanair, côté tri-ovale, à la mi-novembre. Une autre primeur pour le Guide de l’auto qui avait essayé son prototype Concept 3 vingt-cinq ans plus tôt, presque jour pour jour, au même endroit.

Signé Daniel Campagna

Dès le premier coup d’œil sur le Talisman on reconnait le style et l’esprit de Daniel Campagna, toujours passionné de formule 3 et de sportives ultralégères. Le museau pointu rappelle même étrangement celui du Concept 3. La carrosserie ultrabasse arrive aux genoux de son créateur qui pose pour des photos. La garde au sol est pourtant très correcte.

Aux quatre coins, des pneus sport de taille 205/40R17 montés sur des jantes d’alliage noires Motegi et coiffées de simples garde-boue arrondis en fibre de verre. Les freins à disque de 290 mm sont pincés par des étriers Wilwood à quatre pistons à l’avant et des TRW à deux pistons aux roues arrière. Campagna a conçu et fabriqué tous les éléments de la suspension à double triangle et des trains roulants, sauf les porte-moyeux arrière qui sont de Honda.
Pour simplifier la fabrication et réduire les couts, DC Compétition utilise seulement quatre moules pour fabriquer le museau, les grandes « prises d’air » latérales, les sièges et les garde-boue alors que le T-Rex comporte 21 pièces de « carrosserie » différentes.

La finition des pièces en fibre de verre est déjà irréprochable sur le prototype. Comme tout le reste : soudures, attaches, panneaux d’aluminium, filage et conduits. Une marque de commerce pour Campagna, le perfectionniste, qui utilise également du tube d’acier carré, plus facile à tailler et souder, plutôt que du tube rond façon T-Rex pour le châssis.

Sans effort particulier et sans recourir à de (couteuses) pièces d’alliage ou en fibre de carbone, Campagna a construit ce premier Talisman qui pèse « environ 1 280 livres », soit 580 kilos, autour d’un châssis en acier peint. Le tube incurvé qui fait la jonction entre l’avant du châssis et le double arceau de sécurité derrière les sièges ajoute à la rigidité de la structure. Tout comme la grande entretoise en X qui se déploie derrière, entre l’arceau et le moteur.
Campagna est visiblement fier de la double nervure d’aluminium en forme d’éclair qui part de l’arceau vers l’arrière et enveloppe au passage le couvercle de moteur en forme d’aileron en flèche. Cette ligne offre un profil virtuel intéressant au Talisman.

Les petits phares à l’avant sont là « parce qu’on peut très bien rouler sur piste à la noirceur » de dire le concepteur. Il y a deux rangées de DEL rouges à l’arrière pour les feux de position et de freinage. Et même deux DEL blanches pour jouer les feux de marche arrière.

L’essentiel et une surprise

Le cockpit du Talisman est aussi dépouillé que celui d’une voiture de course – sinon plus – mais on peut y rouler à deux. Le plancher bombé, couvert d’un robuste caoutchouc imperméable et texturé, tient lieu de coussin. Les dossiers combinent une coque sculptée en fibre de verre et la même surface de caoutchouc. Ces sièges sont étonnamment confortables.

Il faut d’abord enlever le volant pour se glisser à bord d’une voiture aussi basse et menue. Les commandes, montées de chaque côté, proviennent d’une moto. Droit devant, un petit écran à cristaux liquides avec compte-tours et indicateur de vitesse numériques. Le pédalier est réglable mais l’opération exige actuellement d’enlever le capot. Il est question d’une vis sans fin qui permettrait un réglable facile.

On s’affaire ensuite à boucler et resserrer les larges ceintures de course à quatre points d’ancrage. L’élément le plus inhabituel est un levier de vitesses en métal poli qui est placé à la gauche du pilote. La commande, conçue par Campagna, combine une tringlerie mécanique réglable et des câbles.
Le levier est court et direct comme celui d’une formule Ford. Pas mal pour une boite de Civic! Il faut toutefois s’habituer à passer les vitesses de la main gauche (à moins d’être Britannique, Australien ou Japonais) et on cherche parfois la prochaine, le coude bloqué. Campagna promet d’y remédier en dégageant mieux le bras gauche du pilote, entre autres.

Le moteur actuel du Talisman est de série et sa sonorité est vraiment trop sage pour une sportive, malgré les pots d’échappement sport. Surtout quand on est au volant. Campagna compte y voir sur les futures versions.

Bien né où ça compte le plus

Il fait à peine 2 degrés Celsius pour notre premier essai sur le circuit routier du tri-ovale. Il tombe même un peu de neige durant les premiers moments. En théorie, l’adhérence est nulle et pourtant le Talisman met immédiatement le pilote en confiance tellement son équilibre est impeccable et ses réactions saines et progressives. Et ce n’est encore qu’un prototype.

La confiance est telle qu’on tente un dérapage à l’accélérateur dès le deuxième virage, pneus froids, grains de neige et tout. Le pilote aurait sans doute pu rattraper le tête-à-queue qui suivit avec une direction à crémaillère plus rapide. C’est sur la liste des modifications que compte faire Campagna. Maintenant averti, on enchaine facilement les dérapages contrôlés au même virage par la suite.

Le Talisman s’accroche vaillamment en courbe, malgré ses pneus glacés. Ses réactions sont neutres, le roulis presque nul et le freinage solide. La géométrie de la suspension est impeccable et elle se moque des sections les plus bosselées. Très impressionnant, pour un prototype.

Ça l’est moins côté performance. Les moteurs Honda sont des frileux notoires et celui du Talisman rechigne à plus haute vitesse, même après quelques tours rapides. Il fait vraiment froid ce jour-là, mais la tentation sera quand même forte d’explorer la multitude de pièces conçues pour modifier le moteur R18 en toute fiabilité.

Après les tours de piste, les photos et la vidéo, Campagna et son associé hissent le Talisman dans sa remorque. Direction Plessisville, où se poursuivra son raffinement. DC Compétition compte produire une première poignée de Talisman au cours de l’hiver. On a déjà hâte au printemps pour le premier essai complet, chiffres à l’appui.

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