Bugatti Veyron, la fin du cauchemar ?

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2007

Si vous n’êtes pas un spécialiste des voitures anciennes, sachez que la marque Bugatti, contrairement à ce qu’on serait porté à croire, est française à l’origine puisque Ettore Bugatti a installé ses ateliers tout près de Molsheim en France. La marque a périclité avant le début du second conflit mondial pour être ressuscitée en 1987 par de doux rêveurs italiens avant que le groupe Volkswagen devienne propriétaire de la marque. Mais ce n’était que le début d’un long processus plus cauchemardesque qu’autre chose qui est venu secouer sérieusement la réputation du constructeur allemand.

En effet, après avoir dévoilé au Salon de l’auto de Francfort 2002 le prototype de la Veyron, il s’en est suivi une longue période d’attente alors que la Veyron était exhibée de Salon international en Salon international sans que la voiture ne soit commercialisée. Ce qui a laissé le champ libre à de multiples rumeurs. Selon l’une d’elle, le moteur W16 de plus de
1 000 chevaux, 1001 pour être plus précis, était tellement peu fiable que couvrir une distance de plus de 100 kilomètres tenait de l’exploit. D’après une autre, la voiture était d’une grande instabilité à haute vitesse tant et si bien que la direction de Volkswagen se refusait de la commercialiser comme telle. Enfin, avec une vitesse maximale projetée de 400 km/h, un autre potin soulignait que les pneus Michelin spécialement destinés à ce bolide ne pouvaient résister à cette vitesse. Toujours au chapitre des pneus, il s’agit de Michelin Pax dont la grandeur est 265-680ZR 500A pour les roues avant et de PAX 365-710ZR 540A pour les pneus arrière. Mais la compagnie avait beau présenter cette voiture comme un bijou dans un écrin dans les grands Salons internationaux, plusieurs chroniqueurs automobiles haussaient les sourcils et avaient un petit sourire en coin lorsque les responsables de la compagnie leur annonçaient l’arrivée imminente de la voiture sur les routes.

Tant et si bien que le design devenait de plus en plus vétuste au fil des mois, tandis que les fluctuations du prix du pétrole et la sensibilisation du public envers le problème du réchauffement global rendaient cette voiture de moins en moins politiquement correcte. Et quand on sait qu’elle se vend un peu moins de deux millions de dollars canadiens, il y a de quoi s’interroger quant à la pertinence d’une voiture qui n’est pour ainsi dire pas faite pour rouler sur nos routes et qui tient pratiquement du délire technique. Bref, l’entreprise était devenue cauchemardesque.

Elle prend la route

C’est après cinq ans d’attente, de railleries et d’innuendos que la Veyron a été finalement présentée à la presse. Et, curieusement, pas à la presse spécialisée, mais aux magasines tendance s’adressant aux BCBG. Quoi qu’il en soit, les essais se sont déroulés de façon ultracontrôlée et personne n’a vraiment pu vérifier de quoi était capable cette ultrasportive en fait de performances. Ils ont tous admis que la visibilité arrière était atroce et que l’aiguille de la jauge de carburant descendait à vue d’œil. À pleine vitesse, il faut 12 minutes pour mettre le réservoir à sec. Les journalistes ont été unanimes pour vanter la sonorité de ce moteur W16 de 8,0 litres alimenté par quatre turbocompresseurs. Et si la disposition en W des cylindres vous intrigue, imaginez-vous deux moteurs VR8 à rangées de cylindres à 90 degrés placées côte à côte. Il s’agit en fait d’une version 16 cylindres du moteur W12 de Volkswagen. Et avouez qu’il est quelque peu ironique que ce soit la marque de la voiture du peuple qui fournisse le moteur à la voiture sport la plus chère sur le marché. Bien entendu, pour répartir toute cette puissance, les ingénieurs ont fait appel à une transmission intégrale permanente tandis que la boîte de vitesses est de type séquentiel à sept rapports. Elle est également à embrayage double comme le sont certaines voitures Audi, qui fait d’ailleurs partie de la grande famille Volkswagen.

Le cauchemar se poursuit

Une fois ce bolide d’exception enfin sur la route, on serait porté à croire que le cauchemar de Bugatti se terminerait en apothéose comme au cinéma. Mais conduire une telle voiture sur les routes ordinaires tient presque du mauvais rêve. Je n’ai pas encore eu l’occasion de piloter cette voiture, mais une bonne amie à moi, Jean Jennings de la revue américaine Automobile, s’est payé plusieurs centaines de milles au volant de la Veyron 16.4, l’expérience avait tous les ingrédients du mauvais rêve. Tout d’abord, le seul fait de piloter une voiture de ce prix sur les routes de tous les jours a de quoi inquiéter n’importe qui, même Jean Jennings qui n’est pourtant pas réputée pour être intimidée. En plus, comme la visibilité arrière est assez mauvaise, cela ne vient pas faciliter les choses. Enfin, pour être certain que la voiture ne tomberait pas en panne au milieu de nulle part, une fourgonnette remplie de mécanos suivait la Veyron. Et pour s’assurer que « Madame l’essayeuse » ne ferait pas de gaffes, le directeur des relations de la marque était le passager...

Bref, rien pour écrire à sa mère. Sur papier, la voiture est capable de boucler le
0-300 km/h en moins de 14 secondes et le 0-100 km/h en 3,4 secondes, mais cette voiture n’est pas faite pour rouler dans la circulation. Tout au plus pour aller la stationner devant un établissement de luxe. Pour le reste,il faudra louer un circuit de course pour s’amuser et sans doute amener ses amis mécanos pour la bichonner. Et si vous voulez savoir, en tant que commun des mortels, je me fous pas mal de la Veyron et de tout son clinquant.

feu vert

Marque mythique
Moteur 1001 chevaux
Vitesse de pointe de 407 km/h
Modèle rarrissime

feu rouge

Prix démesuré
Utilisation restreinte
Habitacle exigu
Fiabilité inconnue
Consommation ahurissante

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