Maybach 57/62, déclaration d'excellence

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2005

Au-delà de considérations purement commerciales, qu'est-ce qui peut bien pousser un constructeur auréolé de

gloire comme Mercedes (DaimlerChrysler), à commercialiser la Maybach, une voiture qui se vendra

peut-être à mille exemplaires annuellement ?

Certainement pas les profits qui résulteront d'une telle opération; le retour direct sur l'investissement sera toujours disproportionné par rapport aux sommes en jeu. Non ! La Maybach est plutôt une déclaration faite à la face du monde, pour affirmer la supériorité de la marque. Rappelons que cette limousine a été lancée en 2002, et que son nom fait référence à Wilhem Maybach, longtemps associé à la firme Daimler-Motoren-Gesellschaft (plus tard Mercedes). Avec l'aide de son fils Karl, il construisit ultérieurement, entre 1919 et 1941, seulement 1 800 très opulentes et légendaires voitures portant son nom.

La mesure de la démesure

En arrivant près de la 57 qui m'était réservée, j'avais l'impression d'usurper l'identité d'un richard à la recherche d'une monture à la hauteur de son capital et de son ego. On se sent tout chose lorsqu'on est en sa présence ! La dénomination 57 fait référence à sa longueur hors tout (573 centimètres), et on a même osé mettre sur la route une version 62 (617 centimètres). Ce n'est plus une voiture, c'est un paquebot, mais contrairement à des limousines « stretchées » de mauvais goût, ses proportions demeurent harmonieuses. Vous dire que j'ai eu le coup de foudre pour ses lignes serait encore une de mes nombreuses exagérations. Disons plutôt qu'elle dégage une autorité palpable, intimidante même, mais qu'elle apparaît jusqu'à un certain point élancée, en regard par exemple d'une Rolls-Royce Phantom avec sa calandre dont la taille entre en compétition directe avec les camions Peterbilt.

Les larges portières s'ouvrent pour vous permettre de monter dans un habitacle à la Ali Baba. La décoration impeccable, la suprême qualité des matériaux, le soin apporté à la conception et à l'exécution de chaque détail vous rendent presque mal à l'aise. Même les porte-verres semblent avoir été conçus par un orfèvre ! Seule petite critique sur le choix des matériaux; le cuir nubuck qui recouvre en grande partie les contre-portes, qui reste « marqué » chaque fois que vous le touchez. Les quatre fauteuils ajustables littéralement dans tous les sens vous enveloppent comme un gant géant, l'espace disponible à l'arrière vous laissera pantois, et la 62 permettrait aisément l'installation de petits strapontins. Résumons en une phrase l'incroyable concentration d'éléments intéressants : j'ai pris 30 photos de l'intérieur, et il me manque encore des détails !

Bien nourri par deux turbos, le V12 5,5 litres 36 soupapes offre généreusement 550 chevaux et un couple de 663 lb-pi. Il s'attaque avec

conviction à la titanesque tâche de propulser avec célérité les 2735 kilos de la longue berline. Bizarrement, les premiers millimètres de la course de la pédale de l'accélérateur font augmenter légèrement le régime moteur, mais sans qu'on avance, puis les choses s'animent, surtout en mode Sport, et les accélérations vous calent avec fermeté dans les sièges. La boîte égrène imperceptiblement ses rapports, on entend à peine le moteur changer de régime, mais il ne relâche pas sa poussée. Le freinage s'effectue avec autant de maîtrise, compliments de gros disques pincés en avant par deux étriers à quatre pistons qui arrêteraient même le temps, et l'ABS idéalement programmé laisse à la limite les pneus crisser faiblement avant d'entrer en action.

Long courrier infatigable

Je ne vous surprendrai pas en disant que le confort prodigué par les suspensions impressionne. Il nous fait paraître nos routes presque belles (c'est tout dire!), et le silence qui règne à bord relève de la sorcellerie, grâce entre autres au double vitrage. J'ai cependant été surpris de sentir que les roues arrière décollaient brièvement du sol, à bonne vitesse, au passage

des diaboliques saillies qui traversent nos autoroutes. Mais rien, absolument rien, ne perturbe sa tenue de cap, et elle charge avec un entêtement souverain vers l'orientation induite par la direction très précise. Malgré ses pneus de taille impressionnante, et ses liaisons au

sol pneumatiques avec effet antiroulis et antiplongée, la Maybach semble prendre un fort appui sur les roues avant dans les courbes serrées.

On ne saurait conclure sans parler de son équipement, une véritable litanie capable

d'étourdir les plus blasés. Contentons-nous

de souligner la présence de la climatisation indépendante à quatre zones, de deux moniteurs TV et DVD dans les dossiers des sièges avant, de l'entrée et du démarrage sans clef, de plusieurs assistances à commande vocale, et de réglages à mémoire pour toutes les places assises. Contre toute attente, certaines options apparaissent au catalogue. Mentionnons pour la démonstration l'indispensable petit compartiment réfrigéré à l'arrière et la ventilation alimentée par énergie solaire.

En présence d'une démonstration de savoir-faire aussi éclatante, et même en considérant son prix exorbitant, mais pas nécessairement déraisonnable, on doit lever son chapeau avec respect, et apprécier sa chance inouïe de l'avoir conduite.

Partager sur Facebook

À lire aussi

Et encore plus

En collaboration avec nos partenaires