Lincoln LS, le Clark Kent de l'automobile

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2005

Il est indéniable que la Lincoln LS est l'une des meilleures berlines sport sur notre marché. Avec la Cadillac STS et sans doute la Chrysler 300C, elle fait partie de ces voitures qui vous permettent de vaquer à vos tâches professionnelles ou familiales sans que son caractère sportif entre dans le portrait. Puis, lorsque le temps est venu, elle est aussi capable de jouer les sportives et d'accrocher un sourire au visage de son propriétaire. Pourtant, malgré cette double identité réussie, elle demeure toujours en retrait sur la liste des best-sellers.

Ici, pas besoin d'être très ferré en marketing pour expliquer cette situation. En tout premier lieu, la marque Lincoln n'est pas de nature à intéresser les jeunes conducteurs. L'image de marque n'est pas tellement prestigieuse puisqu'elle est surtout associée aux limousines Town Car et au gigantesque Navigator. Il n'y a pas de quoi se vanter d'être associé à ces modèles si vous voulez impressionner les propriétaires d'Acura TL, d'Infiniti G35 et de BMW Série 3. D'autant plus que la silhouette a récemment pris un coup de vieux. Lors de son lancement, il y a maintenant quatre ans, on pouvait affirmer que la silhouette était sobre et l'habitacle pas tellement inspirant. Cette fois, faute de modifications importantes, c'est carrément vieillot tandis que l'habitacle aurait également besoin d'un sérieux coup de balai. Le tableau de bord ne semble pas appartenir à une voiture de ce prix, la qualité des matériaux est quelconque et plusieurs des commandes semblent empruntées à une Taurus. Et à une époque où la plupart des cadrans indicateurs des voitures de cette catégorie sont à affichage électroluminescent, ceux de la LS semblent fabriqués à partir d'un vulgaire carton imprimé et leur lecture est assez difficile de jour.

Plusieurs des commandes sont petites, difficiles à déchiffrer et à activer. Mais l'élément qui me met le plus en rogne est le levier des clignotants qui agit également à titre de commande des essuie-glaces. Chaque fois que le clignotant est activé, les essuie-glaces se mettent à fonctionner. La première fois, ça peut aller, mais chaque fois, là c'est autre chose ! Sur une note plus positive, il faut souligner que les sièges avant climatisés ont été appréciés d'autant plus que le flot d'air peut être réglé en trois intensités. Le volant sport gainé de cuir se prend bien en main et ses dimensions sont juste ce qu'il faut. Et peu importe le genre de musique que vous aimez, la chaîne audio se mérite de fort bonnes notes. Malgré tout, l'impression de luxe et de sportivité est absente. Il faut également souligner que notre modèle d'essai était la version LSE, la plus huppée et la plus distinctive de la famille avec sa grille de calandre chromée, ses phares antibrouillard intégrés dans l'imposant pare-chocs et son petit aileron arrière.

Une mécanique exemplaire

Si les stylistes ont raté le coche, les ingénieurs ont visé en plein dans le mille. De l'avis de plusieurs, la LS possède l'une des plates-formes les plus efficaces de la catégorie. En passant, elle a été conçue en partie avec la collaboration de la division « Motorsport » de Ford et plusieurs des ingénieurs qui ont peaufiné ses suspensions étaient impliqués à l'époque dans plusieurs activités de course au niveau international pour Ford.

Il en est résulté une plate-forme ultra rigide bénéficiant de suspensions bien calibrées et de pneus fort bien adaptés à la voiture. D'ailleurs, elle a été utilisée sur la Jaguar S-Type, la Ford Thunderbird et plus récemment, la nouvelle Mustang 2005.

Deux moteurs sont offerts, le premier est un V6 3 litres produisant 232 chevaux. Ce n'est pas vilain, mais le moteur de choix est le V8 de 3,9 litres dont les 280 chevaux permettent au conducteur sportif de profiter de l'excellente tenue de route de la LS. La boîte automatique à cinq rapports est bien étagée. Toutefois, celle-ci ne veut pas toujours collaborer. Une accélération initiale, suivie d'un léger allègement de l'accélérateur et d'une pression plus forte se traduit à coup sûr par une secousse importante de la transmission. Autre détail agaçant, le fait de rouler assez vite sur une route bosselée capable d'entraîner une certaine instabilité se termine par un avertissement de mauvais fonctionnement du système de stabilité latérale. Il suffit de s'immobiliser, de couper le moteur et le lancer par la suite pour que tout revienne à la normale.

Pour le reste, cette LS cache bien son jeu. Un peu à la manière du journaliste Clark Kent timide et gauche qui se transformait en Superman dans une cabine téléphonique, la LS peut jouer les dociles berlines à vocation familiale pour se transformer, d'un simple coup d'accélérateur en une sportive à tout crin. Et pas besoin de cabine téléphonique pour ce faire, une section de route sinueuse suffit pour mettre en évidence son comportement routier et le brio de sa mécanique.

Bien que doux et silencieux, le moteur V8 ne se fait pas prier pour passer à l'action et il boucle le 0-100 km/h en 6,9 secondes, tandis que ses reprises sont dans la même note avec un chrono de 6,2 secondes pour effectuer le 80-120 km/h. Et même à 210 km/h, la vitesse maximale enregistrée, elle demeure stable. Enfin, à titre de référence, une BMW 540i coûte plus cher et ses performances ne sont pas meilleures. Mais ce ne sont pas ces données qui font apprécier la LS, mais plutôt sa capacité à enfiler les virages serrés avec aplomb et sans que le pilotage devienne limite. Le transfert des masses est tout en douceur et le train arrière est toujours stable.

Malgré toutes ces qualités, la LS ne jouit pas de la popularité dont elle devrait bénéficier. Preuve que l'écusson Lincoln est plus un stigmate qu'un avantage et que la compagnie Ford est plus efficace à la mise en marché de camionnettes que de berlines sport de luxe.

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