Le groupe AMG à 45 ans, la potion magique de Mercedes-Benz

La boucle a été véritablement bouclée au légendaire circuit belge de Spa-Francorchamps le 30 juillet 2011. Ce jour-là, le jeune pilote allemand Kenneth Heyer a disputé la classique des 24 Heures au volant d’une Mercedes-Benz SLS AMG GT3 rouge qui portait le numéro 35. Quarante ans plus tôt, son père Hans avait réussi l’exploit peu commun de mener une Mercedes-Benz de Classe S vers la victoire dans sa catégorie et une 2e place exceptionnelle au classement général, avec l’aide de son coéquipier Clemens Schickentanz.

Vous l’avez deviné, cette longue et lourde berline était peinte en rouge et portait le numéro 35. L’équipe privée Black Falcon rendait donc un hommage bien senti à ces glorieux pionniers en adoptant la même livrée pour sa SLS AMG GT3, un des sept coupés Gullwing modernes à disputer les 24 Heures de Spa l’été dernier.

Pour l’épreuve de 1971, la grosse berline 300 SEL 6.8 avait été inscrite par AMG, un préparateur allemand qui en était alors à sa toute première course. La firme avait été fondée en 1967 par Hans Werner Aufrecht et Erhard Melcher, tous deux ingénieurs chez Mercedes-Benz. Les initiales de leurs noms de famille forment les deux premières lettres du sigle AMG et la troisième évoque Großaspach, le village natal du premier. Le calcul est simple : la fameuse griffe AMG fête donc ses 45 ans cette année.

La première victoire en ligne droite

Pour décrocher cette victoire en catégorie et grimper sur le podium à Spa en 1971, Heyer et Schickentanz ont dû exploiter à fond les 428 chevaux du gros V8 qui poussait leur voiture jusqu’à 265 km/h, la meilleure vitesse de pointe du plateau. Il le fallait parce que leur berline accusait encore 1 635 kilos malgré des portières en aluminium et des roues de magnésium empruntées à un prototype C111 de Mercedes-Benz. Elles avaient permis de l’alléger de près de 200 kg par rapport à la 6.3 SEL de série.

Les longues lignes droites du circuit tracé dans les Ardennes étaient doublement providentielles parce qu’elles permettaient de refroidir des freins à disque qui n’étaient pas vraiment assez costauds pour tout ce poids. L’équipe ne connut aucun pépin mécanique, un autre exploit pour une course de 24 heures. En une seule course, l’équipe AMG s’était hissée parmi les grands noms de la course en Europe et lancée du même coup sur la voie de la réussite.

En quatre décennies, AMG est probablement allée beaucoup plus loin que ne l’auraient imaginé ses fondateurs dans leurs rêves les plus débridés. La meilleure preuve en est sans doute la SLS AMG dont le fils Heyer pilotait la version course ou « compétition client » à Spa l’été dernier. Il s’agit effectivement de la première voiture créée et construite entièrement par AMG. Le fait que cette grande sportive à carrosserie d’aluminium soit l’interprétation moderne d’un des plus grands classiques du doyen des constructeurs automobiles témoigne du savoir-faire exceptionnel du groupe AMG.

De la course aux Mercedes de série

Le préparateur souabe a vite progressé après cette première victoire à Spa. Les succès en course et la réputation aidant, AMG a utilisé sa maîtrise technique pour développer et produire des accessoires de qualité destinés aux voitures de série. Des composantes en tous genres pour améliorer les performances, l’apparence et la tenue de route des Mercedes-Benz. De quoi rendre plus excitantes et séduisantes des voitures reconnues avant tout pour leur solidité et leur sécurité.

AMG a modifié et décoincé les Mercedes avec tellement de talent que le constructeur de Stuttgart en a vite fait son premier transformateur officiel, le premier et le plus important de la légion de tuners qui allaient apparaître au cours des années 70 et les suivantes. Sans compter qu’AMG collectionnait les victoires et les titres avec des voitures de course qui portaient toujours fièrement la grande étoile à trois pointes des Mercedes-Benz sportives. Et les avancées techniques développées en course profitaient inévitablement aux composantes AMG conçues pour les voitures de série.

CLK-GTR

L’équipe AMG a décroché le championnat des pilotes de la prestigieuse série germanique DTM (Deutsche Tourenwagen Meistershaft) huit fois et le titre de meilleure équipe à neuf reprises. En plus de remporter le championnat ITC (International Touring Car Championship), elle rafle en 1997 le premier titre en série FIA GT avec la spectaculaire CLK-GTR, une pure voiture de course créée entièrement dans ses ateliers en seulement 128 jours.

La structure et la carrosserie de la CLK-GTR sont faites essentiellement de fibre de carbone et son moteur est une version course du V12 de 6,0 litres de la S 600 qui produit 612 chevaux. Elle est pilotée par l’Allemand Bernd Schneider, toujours le grand recordman des titres, victoires, positions de tête et tours les plus rapides en série DTM. L’équipe remet ça brillamment l’année suivante en gagnant les onze courses de la série FIA GT, dont six avec des doublés au sommet. Le duo Klaus Ludwig et Ricardo Zonta décroche le titre des pilotes et l’équipe AMG est évidemment couronnée chez les constructeurs.

Demain le monde

En 1976, AMG déménage ses pénates et ses 40 employés du vieux moulin de Burgstall − où elle était installée depuis ses débuts − vers de plus grands ateliers situés dans la ville voisine d’Affalterbach. En 1985, elle s’offre une deuxième usine et embauche son 100e employé. La croissance se poursuit en 1990 avec l’ouverture d’une troisième usine. Le groupe compte maintenant 400 employés.

Mais le plus important, cette année-là, fut la conclusion d’une entente de collaboration avec Daimler-Benz AG. Grâce à ce rapprochement, les produits AMG allaient désormais être distribués, vendus, installés et entretenus chez tous les concessionnaires Mercedes-Benz de la planète. Les ligues majeures pour un tuner. Trois ans plus tard, en 1993, Mercedes-Benz lançait un premier modèle conçu en collaboration avec AMG.

C 36 AMG

La berline C 36 AMG nous arrivera seulement en 1995. C’est une version vitaminée de la Classe C qui est dotée d’un six cylindres en ligne de 3,6 litres et 268 chevaux, lequel est couplé à une boîte automatique à 4 rapports. Aux essais annuels de l’AJAC, elle expédie le sprint 0-100 km/h en 6,2 secondes et le quart de mille en 15,1 secondes avec une pointe de 155,9 km/h. Sa distance d'arrêt de 34,99 mètres en freinage d'urgence à 100 km/h est excellente.

L’année 1999 est marquante pour AMG parce que la corporation alors nommée DaimlerChrysler AG acquiert une part majoritaire des actions d’AMG que détient Hans Werner Aufrecht. Chez nous, Mercedes-Benz tire une double salve avec les modèles C 43 AMG et E 55 AMG.

La C 43 AMG commande 302 chevaux de son V8 de 4,3 litres, le premier pour une Classe C, qui effectue un 0-100 km/h de 6,35 secondes et un quart de mille en 14,61 secondes à 163,3 km/h. Ses quatre freins à disque la font stopper de 100 km/h en 36,67 mètres. Ils sont également les premiers à être complétés d’un dispositif de freinage d’urgence assisté (Brake Assist ou BAS) qui bousille allègrement la modulation du freinage en conduite normale. Un mal dont souffre encore un grand nombre de voitures allemandes et autres.

E 55 AMG

La berline E 55 AMG est la première Classe E à profiter du traitement AMG. Son V8 de 5,5 litres et 349 chevaux lui permet un 0-100 en 5,62 secondes et le quart de mille en 13,86 secondes avec une pointe de 172 km/h. Elle freine de 100 km/h en 38,92 mètres, une performance convenable. Puissante et rapide, lourde et luxueuse, la E 55 AMG est la digne descendante de la 300 SEL 6.8 AMG de 1971 et aussi peu à l’aise que son aïeule sur un circuit le moindrement serré. Mais ces choses vont bientôt changer.

Des trophées pour la cavalerie

Les changements accélèrent au même rythme que la production chez AMG. Le 1er janvier 2005, DaimlerChrysler devient propriétaire à 100 % du groupe qui se nomme Mercedes-AMG GmbH et compte 680 employés à l’époque. Prototypes et modèles de série se multiplient à un rythme infernal. Le groupe s’est effectivement donné pour objectif de produire au moins une version AMG pour chacune des Classes au sein de la gamme Mercedes-Benz, à l’exception des compactes A et B. En parallèle, l’équipe de course AMG collectionne toujours les victoires et les titres en série DTM.

Les coups d’éclat et les exploits techniques se succèdent également. En 2003, AMG rafle la palme du meilleur moteur de performance décerné par le jury des prix International Engine of the Year pour son V8 compressé de 5,5 litres et 493 chevaux qui pulvérise le 0-100 en 4,75 secondes et le quart de mille en 12,71 secondes en touchant 187,9 km/h sous le capot du roadster SL 55 AMG. Signé comme tous les moteurs AMG par le technicien qui l’a fièrement assemblé, il équipe également les modèles CL 55, E 55 et S 55.

CL 65 AMG et S 65 AMG

En 2004, c’est le V12 biturbo de 6,0 litres et 621 chevaux des CL 65 et S 65 qui décroche le prix du meilleur moteur de performance de la planète. Le nouveau V8 de 6,2 litres fait mieux encore en récoltant le même prix en 2009 et 2010. Créé entièrement chez AMG, le moteur atmosphérique le plus puissant pour un modèle de série apparaît d’abord sous le capot de l’utilitaire ML 63 AMG, marché oblige.

AMG a également réussi avec panache le V8 à double turbo de 5,5 litres qui a pris le relais du 6,2 litres dans les versions 2012 redessinées des CLS 63 et E 63. Avec un rugissement fabuleux et une montagne de couple à tout régime, ce groupe n’a rien à envier à son prédécesseur en puissance et en caractère.

La SLS comme un couronnement

Mais l’apogée de cette saga est sans conteste le lancement en 2010 du coupé SLS AMG. Cette version moderne du grand classique qu’est la 300 SL Gullwing des années 50 est propulsée par une version à carter sec du même V8 atmosphérique primé de 6,2 litres qui produit cette fois 563 chevaux. La coque entièrement en aluminium, le moteur et les autres composantes de cette voiture ont été conçus et développés par AMG. Et le groupe y donne rapidement suite en créant en succession la SLS AMG roadster de série, la SLS AMG GT3 de compétition et la SLS AMG E-Cell à propulsion électrique qui sera lancée en 2013.

Il y a actuellement quatorze modèles AMG au sein de la gamme Mercedes-Benz au pays en comptant la familiale E 63 AMG et le roadster SLK 55 AMG qui arrive bientôt. Mais le plus fascinant est de constater que les progrès rapides des modèles AMG actuels en tenue de route, en caractère et en plaisir de conduite influencent directement les autres séries chez Mercedes-Benz.

Cette osmose transforme peu à peu toutes les Mercedes. Ce ne sont donc pas seulement les passionnés de conduite et les mordus de mécanique qui profiteront du savoir-faire et des secrets techniques du groupe créé par Hans Werner Aufrecht et Erhard Melcher il y a maintenant quarante-cinq ans. Ces deux-là ont de quoi être très fiers.

Partager sur Facebook

Plus sur le sujet

BlogueMercedes-AMG, le succès canadien
Il y a quelques semaines, le Guide de l’auto a pu faire l’essai de la Mercedes-AMG E 63 S, une machine de guerre qui ne sera certes pas donnée mais qui redéfinit la berline intermédiaire sportive, rien de moins. Lors de cet événement, nous avons appris que seule la version …

À lire aussi

Et encore plus

En collaboration avec nos partenaires