Volkswagen Phaeton, l'insurmontable défi

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2004

Volkswagen voit grand, trop grand peut-être. Après la Passat W8 de 55 000 $, la marque de Wolfsburg propose cette année une nouvelle berline ultraluxueuse d'environ 100 000 $, la Phaeton, destinée à ravir des parts de marché à des modèles aussi prestigieux que la Mercedes-Benz S430 ou la BMW 745i. Grosse commande, comme on dit chez nous. Tellement grosse en fait que chez les analystes du marché automobile, personne ne croit en la faisabilité d'un tel projet.

La voiture qui est au centre de ce défi considérable n'est pas dépourvue de qualités, loin de là. et il est certain qu'elle est très comparable à ses rivales lorsqu'il est question de performances, de comportement routier ou de confort. Là où le bât blesse toutefois, c'est au chapitre de l'image et il faudra avoir vendu plus que des réfrigérateurs à des Esquimaux pour réussir à convaincre un client de faire un chèque dans les six chiffres pour une voiture issue d'une marque qui a toujours été synonyme d'économie. La partie semble perdue d'avance.

On aura beau encenser la Phaeton et s'extasier sur l'usine de Dresde où elle est construite, elle n'a pas fait d'étincelles depuis son apparition sur le marché européen et son avenir reste incertain. La création de ce modèle est d'autant plus incompréhensible qu'il sera appelé à concurrencer un autre membre de la grande famille Volkswagen, l'Audi A8. Au mieux, les ventes de Phaeton se feront aux dépens du modèle haut de gamme de la firme d'Ingolstadt.

Des lettres de noblesse

Bien que la ligne donne l'impression que l'on a affaire à une Passat bourrée de stéroïdes, il s'agit d'une voiture entièrement nouvelle faisant appel à un châssis inédit. Deux versions sont offertes jusqu'ici (empattement normal et allongé), mais il est question d'un modèle supersport appelé R60 qui hériterait du moteur W12 6 litres de la Bentley Continental GT dont on pense extraire 600 chevaux.

La Phaeton actuelle rejoint, à quelques centimètres près, les dimensions de ses concurrentes de Stuttgart et de Munich, mais elle s'avère plus lourde malgré la présence de panneaux d'aluminium pour les portières, le capot avant et le couvercle du coffre. Cet embonpoint est sans doute ce qui explique que le moteur W12 de 6 litres ne semble pas aussi performant que le laissent supposer ses 420 chevaux. Les accélérations sont franches et les reprises énergiques, mais BMW et Mercedes obtiennent des résultats similaires avec des V8 de cylindrée inférieure. Cette imposante mécanique est gérée par une transmission automatique Tiptronic à cinq rapports qui, dans les versions européennes, est contrôlée par des palettes placées derrière le volant comme dans les Ferrari. Toutefois, contrairement à la boîte séquentielle des voitures italiennes qui est une boîte manuelle sans embrayage, celle de la Phaeton est une automatique dont les boutons Tiptronic ont été remplacés par des palettes. On ignore également si les autres moteurs offerts en Europe (dont le V8 4,2 litres de 330 chevaux de l'Audi A8 2004 et un V10 turbodiesel de 313 chevaux) seront offerts chez nous.

Ajoutons à cela le système de traction intégrale 4Motion et une suspension pneumatique offrant deux niveaux de hauteur et quatre réglages d'amortissement allant de « confort » (souple) à « sport 2 » (très ferme) et on aura à peu près fait le tour de tout ce qui donne à la Phaeton ses lettres de noblesse.

Stabilité et silence

La plus grande qualité de la voiture risque malheureusement de passer inaperÇue auprès des conducteurs d'ici en raison de nos limites de vitesse. Conformément à une entente tacite entre les constructeurs allemands (à l'exception de Porsche), Volkswagen a limité la vitesse de pointe de la Phaeton à 250 km/h, mais il est rassurant de savoir que le châssis a été étudié pour des vitesses frôlant les 300 km/h. Plusieurs sprints sur l'autobahn entre 220 et 250 km/h m'ont permis de découvrir l'étonnante stabilité de la voiture à très grande vitesse. J'irais même jusqu'à dire que la nouvelle limousine de VW surpasse ses concurrentes à ce chapitre. Un autre domaine où elle devance ses rivales est celui du niveau sonore qui est remarquablement faible grâce à la présence de glaces latérales à vitrage double et de triples joints d'étanchéité pour les portières.

Le comportement en virage est également impressionnant et sans avoir l'agilité d'une berline sport, la Phaeton n'accuse pas un roulis exagéré. Ce n'est qu'au freinage que la voiture est pénalisée par son poids ; l'avant a tendance à piquer du nez lors d'un freinage intensif.

À l'intérieur, l'équipement est pléthorique, si bien que la voiture est dotée de deux batteries, l'une pour le démarreur et l'autre pour les multiples accessoires qui font partie de l'équipement de série ou optionnel. Il y a bien sûr le centre de commandes « Infotainment » qui regroupe le système de navigation par satellite, la chaîne stéréo, la climatisation, l'ordinateur de bord et que sais-je encore. Ce que j'ai retenu surtout de ces deux jours au volant de la Phaeton, c'est l'attention accordée à de petits détails comme les charnières du coffre à bagages en métal poli ou encore les articulations des accoudoirs arrière qui sont en chrome massif. Tout cela dégage une impression de qualité qui montre bien que Volkswagen a fait son travail sérieusement.

En bout de ligne, force est d'admettre que la Phaeton est une excellente voiture qui répond impeccablement à la définition d'une voiture de luxe haut de gamme. Malheureusement, il lui manque un patronyme de prestige et l'emblème VW pourrait représenter un insurmontable défi.

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