Lincoln LS, un coup d'épée dans l'eau

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2004

Qu'on se le dise, le Navigator a jusqu'ici fait plus pour Lincoln que la LS, censée concurrencer les meilleures réalisations européennes et japonaises dans le segment des berlines sport. Pourtant, à son lancement il y a trois ans, tous les espoirs étaient permis. Elle était si bonne, au dire des dirigeants de Lincoln qu'elle serait commercialisée en Europe et permettrait du coup à Lincoln de revitaliser son image. Le projet a été abandonné, la LS demeure en Amérique où les consommateurs ne se bousculent pas aux portes pour l'acquérir.

Au moment où vous lirez ces lignes, Lincoln se remet ? encore ? en question. Contrairement à Cadillac qui semble trouver sa voie, Lincoln patauge et ne sait plus où donner de la tête. Bousculée sur son marché national, la marque a, avec la LS du moins, vainement tenté de redorer son blason avec des véhicules plus « hop la vie ». Aujourd'hui, le sort (et la rentabilité) de Lincoln passe par le Navigator et la Town Car. Et la LS ? Elle s'accroche, même si elle n'ambitionne plus de figurer au sommet du palmarès des ventes. Comment expliquer ce revers de fortune ? Une grande partie est sans doute attribuable à la silhouette ultraconservatrice de cette berline. Dessinée par un Allemand, transfuge de BMW, la LS n'est jamais parvenue à se détacher visuellement de la concurrence, à asseoir la marque sur une base nouvelle, et à communiquer ses nouvelles ambitions. Style frileux, manque d'émotion, la LS n'a rien pour vous faire dire « oui je la veux ». Elle laisse plutôt de glace et se fond si bien dans le paysage automobile qu'on finit par oublier qu'elle existe. Deuxième explication. Le réseau de concessionnaires qui a fait l'objet ces dernières années de plusieurs remaniements, pas tous très heureux. Alors qu'autrefois les produits Lincoln côtoyaient ceux de Mercury, ils sont aujourd'hui noyés dans l'univers de Ford avec ses camionnettes F-150 et autres Focus. Sans exiger pour autant le tapis rouge, la clientèle souhaite un minimum d'égards, des représentants qui connaissent sur le bout des doigts le produit. Et à plus forte raison avec la LS qui se démarque complètement des autres produits Lincoln par son caractère sportif.

La LS aurait certainement mérité une carrière plus étincelante. D'autant plus qu'elle repose sur une base mécanique à la fois moderne et performante. La même qui se retrouve sous la robe de la S-Type de Jaguar. Bien sûr, il existe des différences, mais la LS n'a pas à rougir de la comparaison avec sa cousine anglaise. Tout comme cette dernière, la LS donne droit à deux mécaniques de se glisser sous son capot. L'offre initiale consiste en un V6 3 litres de 232 chevaux, l'autre d'un V8 3,9 litres délivrant 280 chevaux. Au cas où vous vous trouviez sur autre planète dans la dernière année, sachez que la transmission manuelle à cinq rapports a été retirée du catalogue, mais fait toutefois son apparition dans la Jaguar cette année. Pas le choix, vous devrez composer avec une boîte semi-automatique à cinq rapports. Cette dernière a fait l'objet d'une révision au cours de la dernière année dans le but de rendre son fonctionnement plus souple et plus discret. Autre nouveauté, les éléments suspenseurs ont, eux aussi, été retouchés pour les mêmes raisons.

Au vestiaire, les préjugés

Pour l'année qui vient, certains remaniements ont été apportés à la nomenclature de la gamme. Une nouvelle version, LES, s'ajoutera en cours d'année. Celle-ci se distinguera visuellement des autres en raison de ses carénages avant et arrière plus agressifs, ses phares antibrouillards intégrés, sa calandre nickelée et son aileron grimpé sur le couvercle du coffre à bagages. À l'intérieur, des boiseries se chargeront de réchauffer l'ambiance qui autrement est un peu tristounet. Et ce n'est certainement pas la présence d'un système de navigation (offert en option) qui va égayer l'habitacle. L'écran de ce dernier est enraciné au pied de la console centrale, donc impossible à consulter sans quitter la route des yeux. Par chance, l'instrumentation, au demeurant, complète, est parfaitement lisible et les principales commandes correctement disposées. Sans être un modèle de support, le baquet du conducteur offre un confort très appréciable et ses nombreux réglages favorisent l'atteinte d'une position de conduite agréable. À l'arrière, l'espace réservé aux occupants est correct, sans plus. Le coffre, en revanche, est peu profond.

Sur la route, la LS nous fait oublier la tiédeur de ses lignes extérieures, le manque de raffinement de sa présentation intérieure. Lorsque équipée du V8 de 3,9 litres, cette Lincoln ne se fait pas prier pour bondir. Facile à prendre en main, la LS se révèle étonnamment agile et sûr. Plus que ne l'est la CTS de Cadillac qui intimide davantage celui ou celle qui se trouve à son volant. Équilibrée, la LS l'est aussi. En raison de l'excellente répartition des masses entre les trains roulants, elle ne se fait pas prier pour rouler vite et bien. Les mouvements de caisse sont bien maintenus et le confort ne souffre pas du compromis trouvé par les ingénieurs affectés à son développement. L'amateur, le vrai, de produits Lincoln reprochera sans doute à la direction de la LS de ne pas filtrer parfaitement les irrégularités de la chaussée, et c'est tant pis pour eux.

Pour rouler incognito

Si la marque d'une voiture et son allure extérieure ne vous impressionnent pas du tout, la LS mérite considération. Mais à en juger par les ventes de LS, vous êtes très peu nombreux à dire que cela ne vous dérange pas de rouler incognito au volant d'une automobile dont la marque est associée à tout, sauf le sport.

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