Ford Mustang, Mach 1 comme dans macho

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2004

Il y a longtemps que je n'avais pas eu autant de plaisir tout habillé. Vous me direz que les Murciélago, Vanquish ou Ferrari 575 Maranello ne sont pas tout à fait des voitures? déplaisantes et vous avez raison. Mais, avec des objets aussi précieux, il faut faire preuve d'une certaine réserve, ne serait-ce qu'en vertu de leur prix faramineux. Tandis qu'avec une Ford Mustang arborant en plus l'insigne Mach 1, on peut s'éclater (et même retomber en enfance dans mon cas) sans cette appréhension que le moindre geste malhabile vous endettera pour l'éternité. Que peut bien receler une telle voiture pour faire monter à ce point votre taux d'adrénaline ?

Peu et beaucoup de choses à vrai dire. Notamment le meilleur rapport prix/performance de la production automobile actuelle. Pouvoir s'aligner avec une GT Mach 1 aux côtés d'une Porsche 911 et avoir une chance de la « clancher » vaut nécessairement son pesant d'or. Et ce n'est même pas la plus performante des Mustang, un rôle assumé par la version SVT Cobra de 390 chevaux. La Mach 1, dit-on, doit se contenter de plus de 305 chevaux (dixit Ford) et croyez-moi, c'est amplement suffisant pour vous faire retrouver la belle époque des voitures américaines musclées et effrontées. À environ 38 000 $, Ça ressemble même à une aubaine.

Mine de rien, la Mustang est la dernière survivante de l'ère des pony-cars. Née en 1964 et demie, elle a entraîné dans son sillage les Camaro, Firebird, Barracuda, Javelin et autres bolides de la même espèce. Aujourd'hui, tout le monde a tiré sa révérence, sauf cette icône de l'industrie automobile américaine. Introduite dans sa forme actuelle en 1994, la Mustang a 10 ans bien sonnés. Elle en est toutefois à son dernier tour de piste puisqu'elle sera remplacée par une version rajeunie en 2005 (voir section Avant-goût des modèles 2005). Raison de plus pour en faire l'essai une dernière fois.

Un moteur « in »

La puissance de la Mach 1 n'est pas seulement une affaire de gros cubes comme autrefois et son V8 de 4,6 litres à 48 soupapes et double arbre à cames en tête est une mécanique sophistiquée. Même s'il ne possède ni turbo ni compresseur (une exclusivité de la Cobra), on pourrait en parler comme d'un moteur « suralimenté » avec cette immense prise d'air sur le capot qui l'aide à respirer et qui se déhanche au moindre petit coup d'accélérateur. Ce capot, incidemment, est d'une telle lourdeur que j'ai l'impression que l'on pourrait grignoter quelques dixièmes de seconde aux temps d'accélération en substituant le métal par une matière plastique. Jumelé à une boîte manuelle à cinq rapports dont le levier se manipule aisément avec sa grosse boule chromée en guise de pommeau, le moteur est secondé par une série de modifications comprenant notamment une suspension abaissée de 1 cm par rapport à la version GT, de nouveaux ressorts et jambes de force (Tokyco) et, quoi d'autre, des freins Brembo avec étriers haute performance. À l'intérieur comme à l'extérieur, plusieurs petites touches rétro rappelleront aux amateurs les anciennes Mach 1. On y retrouve aussi d'excellents sièges Recaro, un petit volant très communicatif, un pédalier avec repose-pied tout en inox, une chaîne stéréo Mach 460 capable de faire trembler la terre entière et une abondance de plastiques bon marché plutôt mal assemblés.

Dans le tapis

Comme dirait mon ami Paul Frère, cette Mustang ne fait pas dans la dentelle. C'est plutôt une sorte de brute sympathique qui prend plaisir à se laisser battre. Musique à plein régime, accélérateur à fond, on relâche l'embrayage et la voiture bondit furieusement en avant dans un crissement de pneus en dépit de la présence de l'antipatinage. Ce V8 offre un tel couple à bas régime qu'on a l'impression que rien ne peut lui tenir tête. Ce n'est qu'en s'approchant des 7000 tr/min qu'il devient un peu plus calme même si le 80-120 km/h en 4e ne prend que 5,4 secondes (contre 6,1 secondes pour votre 911), un quasi-record pour une voiture à boîte manuelle. On continue de s'amuser follement dans les virages grâce à une tenue de route spectaculaire très facile à exploiter. Malgré sa vétusté, le châssis fait montre d'une bonne rigidité, et c'est surtout par sa carrosserie brinquebalante que la Mustang nous fait sentir qu'elle n'est pas de la dernière cuvée. Bref, cette Mach 1 ne s'adresse pas aux petites natures et on doit supporter les ruades de la suspension sur mauvaise route. Et gare aux nids-de-poule dont le franchissement s'accompagne de quelques bruits de caisse et de quelques secousses bien ressenties. Ce n'est donc pas le grand confort, mais disons que l'on a vu pire. Je n'aurai que des éloges pour la direction qui, par sa vivacité, rend la voiture tellement plus maniable que ne l'était son ancienne rivale, la Camaro. Pour ce qui est du freinage, il est convenable mais pas plus. Il s'acquitte relativement bien d'un arrêt d'urgence, mais il n'a pas l'endurance nécessaire pour aller folâtrer sur une petite route sinueuse en montagne.

Un dernier coup d'?il au carnet de notes pour vous dire que le tableau de bord bénéficie d'une instrumentation très complète, que la visibilité est acceptable, que les places arrière sont de type « temporaire » et que le coffre à bagages offre un volume étonnant pour une voiture sport.

Si vous croyez que la Mustang Mach 1 est une belle imprimante à contraventions, vous n'avez pas tort. Désolé d'avoir à vous dire que le modèle de base avec son V6 de 3,8 litres est une voiture bien ordinaire et que la version GT est sans doute le compromis idéal pour vous aider à retrouver votre jeunesse? et à perdre votre permis de conduire. Voyez-vous, Monsieur le juge? euh !

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