Dodge Viper SRT-10, une brute à l'état pur

Tel que publié dans le Guide de l'auto 2003

Après avoir fait la belle sous la forme d'un prototype dans les salons de l'auto un peu partout à travers l'Amérique, la Dodge Viper SRT accède cette année à la production en série. En petite série devrions-nous dire puisque cette brute à l'état pur est loin d'être la voiture de monsieur Tout-le-Monde. On a eu beau la doter d'un ABS, d'un tableau de bord revu et corrigé par l'ex-Québécois Ralph Gilles, d'un habitacle plus spacieux et d'un toit souple moins artisanal, elle demeure une voiture d'exception qui s'adresse à une minorité de conducteurs dont la principale préoccupation est la performance avec un grand P.

C'est, curieusement, la tentative de doter la Dodge Viper d'un toit cabriolet digne de ce nom qui a donné naissance au nouveau modèle qui voit le jour cette année. Les ingénieurs ont découvert qu'il leur fallait allonger la plate-forme de 6,6 cm afin d'installer le mécanisme du toit. Ce qui les obligeait en même temps à modifier plus de 50 % des pièces de la carrosserie et plusieurs composantes mécaniques. Constatant ce problème, ils ont décidé de repartir à zéro. En accord avec sa vocation première, la nouvelle Viper est également le premier véhicule à être lancé par la division PVO responsable du développement des voitures sport chez Chrysler.

Ces lettres signifient Performance Vehicle Operation et ce groupe a la charge du développement de tous les modèles sportifs et haute performance affichant les emblèmes Chrysler et Dodge. Comme modèle inaugural, il eût été difficile de trouver mieux que la Viper, l'une des voitures sport les plus spectaculaires sur le marché. Et même si ce sont des considérations d'ordres pratique et esthétique qui ont mené à ce renouveau, soyez assuré que le volet haute performance de la Viper n'a pas été négligé.

505, 500, 525

Pour répondre aux attentes des propriétaires de Viper, les ingénieurs ont d'abord fourré leur nez sous le capot afin d'améliorer la puissance et le couple du moteur V10 qui équipe ce modèle depuis ses débuts sur le marché. La cylindrée a été augmentée à 8,3 litres (505 pouces cubes pour les conservateurs) tandis que la puissance est passée de 450 à 500 chevaux. Mais c'est surtout un couple hors du commun qui a toujours caractérisé ce gros V10. Le voici rendu à 525 lb-pi. Ce V10 est toujours couplé à une boîte manuelle Tremec T56 à 6 rapports dotée d'un mécanisme à commande électronique permettant de « sauter » les 2e et 3e rapports lorsque le système détecte une conduite lente et détendue. Dans sa dernière version, la Viper hérite de freins Brembo qui sont non seulement plus gros mais munis d'étriers à quatre pistons. On retient surtout toutefois que ceux-ci sont enfin dotés d'un système ABS pouvant fonctionner jusqu'à plus de 300 km/h.

Toujours sur le plan technique, signalons que la plupart des éléments de la carrosserie sont fabriqués de matériaux composites. En plus, des essais poussés réalisés en soufflerie à Stuttgart, en Allemagne, ont mené au développement d'un bouclier aérodynamique placé sous la voiture qui crée un effet de dépression. Il en résulte une moins grande résistance à l'air et une voiture plus stable à grande vitesse.

On s'attache

Même si l'habitacle est un brin plus spacieux qu'auparavant, il ne faut pas être claustrophobe pour conduire une Viper. Lorsque le toit est en place, on doit se contorsionner pour s'installer dans le siège du conducteur. Une fois l'exploit réalisé, on y est cependant très confortable. Toutefois, l'avant du siège est assez élevé, ce qui ne plaira pas à tout le monde. On souhaiterait aussi un plus grand nombre de réglages pour ce même siège. Heureusement que le volant et le pédalier sont réglables. Il est alors possible d'adopter une bonne position de conduite tandis que le repose-pied, également ajustable, s'avère fonctionnel. Même s'il est placé très haut sur la console centrale, le levier de vitesses s'attrape facilement. Par contre, il exige une bonne poigne et l'enclenchement des rapports est parfois imprécis.

La pièce de résistance de la Viper demeure cependant son moteur dont la puissance permet de signer des chronos qu'une Ferrari ne renierait pas. Bref, autant les reprises que les accélérations sont foudroyantes. Vous pourrez, tout à loisir, brûler du caoutchouc et laisser votre marque sur le bitume, mais sachez que c'est une habitude qui risque de vous coûter cher, car les gros Michelin Pilot ZP (P345/30ZR19) qui équipent la voiture ne sont pas donnés. Avec ces pneus larges, un châssis plus rigide et une suspension de type course à amortisseurs en aluminium, la tenue de route a de quoi mettre votre bravoure à l'épreuve. Dans les virages serrés, la voiture reste rivée à la route et le roulis de caisse minimal. Il faut également souligner que la direction est plus précise et que cette SRT-10 possède désormais une tenue de cap qui exige moins de corrections qu'avant à haute vitesse. Relativement puissants, les freins gagnent cependant en efficacité une fois réchauffés. Et les freinages en catastrophe ne risquent plus de ruiner un jeu de pneus puisque cette Viper peut désormais compter sur un système ABS prévenant le blocage des roues. Rien n'a été fait par ailleurs pour remédier au problème des sorties d'échappement le long des portes. L'air chaud entre dans l'habitacle lorsque la capote est baissée. Et il faut toujours être aussi prudent pour ne pas se brûler les jambes en descendant de la voiture.

En ne faisant que de très rares concessions au confort, la voiture devient rapidement désagréable sur des routes bosselées. La suspension est si dure que cela s'entend et le bruit finit par tomber sur les nerfs. Le nouveau toit, une fois en place, limite à ce point la visibilité 3/4 arrière qu'il faut pratiquement un copilote pour nous aider à y voir clair. Parions que les inconditionnels de la Viper ne s'en plaindront pas, car elle garde ce caractère pur et dur si cher aux adeptes de ce modèle.

Dodge à l'écoute

Les propriétaires de Viper ont eu leur mot à dire dans l'élaboration du modèle de seconde génération. Ceux-ci souhaitaient une plus grande puissance, de meilleurs freins, une diminution du poids, un nouveau mécanisme pour le toit souple, un repose-pied et, dans l'ensemble, un confort accru. Ingénieurs et stylistes savaient donc à quoi s'en tenir et ils se sont mis à l'?uvre. La responsabilité du look extérieur a été confiée à Osamu Shikado qui a amorcé les premiers dessins de ce projet au tournant du millénaire. Si les lignes de la première Viper étaient quelque peu caricaturales, celles de la version 2003 s'avèrent nettement plus épurées. Le lourd capot monocoque de type coquille d'huître a été remplacé par un capot traditionnel et les ailes sont indépendantes de celui-ci.

Un Québécois à la rescousse

Mais si l'extérieur de la Viper a toujours fait l'unanimité, son habitacle était moins réussi. Non seulement le manque d'espace était flagrant, mais le tableau de bord était passablement rudimentaire : cadrans et commandes avaient été disposés là où l'on pouvait, mais pas nécessairement là où il aurait fallu. C'est au Montréalais Ralph Gilles, le styliste responsable de l'habitacle du Jeep Liberty, qu'on a confié la responsabilité de remédier à ces faiblesses. Les cadrans indicateurs secondaires ne sont plus éparpillés sur la largeur de la planche de bord, mais disposés verticalement à la droite du volant. Le pilote est donc en mesure de les consulter très facilement. Un compte-tours imposant trône au milieu de la nacelle centrale. Après tout, dans une voiture sport, c'est l'élément clé en fait d'information. Il est flanqué à gauche de la jauge de carburant et à droite de l'indicateur de vitesse. À l'intérieur de ce dernier cadran, nous retrouvons l'odomètre et le totalisateur journalier. Toutefois, leur affichage numérique n'est pas facile à lire tandis que le bouton de remise à zéro s'avère difficile d'accès. Le pédalier est à réglage électrique et les pédales en aluminium sont recouvertes d'une couche antidérapante, une excellente idée. Soulignons également que les sièges mi-cuir/mi-suède ont déjà des ouvertures prévues pour une ceinture à six points d'attache. Ces sièges sont de type course avec des bourrelets latéraux tant sur les côtés du siège que du dossier. Enfin, les éléments d'apparence métallique comme l'anneau de la gaine du levier de vitesses et les poignées de fermeture des portières sont en métal et non pas des imitations en plastique.

Et j'allais oublier, le toit souple qui a été à la source de tous ces changements est simple à faire fonctionner avec son unique point d'ancrage et sa légèreté attribuable à l'utilisation de titane dans sa structure. De plus, une fois replié, il n'est plus nécessaire de le recouvrir d'une housse. Ce qui évite d'encombrer le coffre qui n'est déjà pas trop grand d'avance.

Tout cela fait de la nouvelle Viper une voiture plus pratique et plus esthétique que l'ancienne. Elle est également plus rapide que la précédente tout en étant également plus confortable et plus civilisée. Et si les performances vous semblent trop « timides », sachez que Dodge prévoit produire chaque année 25 exemplaires d'un coupé réservé à la piste. Avec 520 chevaux et une carrosserie partiellement en fibre de carbone, ce bolide fera parler de lui, même s'il ne sera disponible qu'au compte-gouttes.

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