Les prix nord-américains, un vrai marathon pour de vrais résultats

Vous avez raison de croire qu’on décerne à chaque nouvelle année une quantité incroyable de prix à des voitures et autres véhicules. On s’y retrouve déjà difficilement et leur nombre semble pourtant augmenter sans cesse. Chaque magazine, émission ou site web consacré à l’automobile semble inévitablement avoir la tentation de créer ses propres prix et plusieurs y succombent. On peut les excuser d’y voir une occasion de soigner leur promotion ou de simplement se faire connaître.

À 46 ans bien sonnés, le Guide de l’auto n’a plus vraiment besoin de présentation mais a quand même ses prix annuels. L’équipe choisit ses trois « premiers de classe » dans 21 catégories et prime également la meilleure nouvelle voiture, le meilleur nouvel utilitaire, la meilleure nouvelle technologie et le meilleur nouveau design.

La force variable du nombre

Parmi cette multitude de prix, il y en a néanmoins qui ressortent et s’élèvent au-dessus de la mêlée et des stratégies promotionnelles à concentration et géométrie variables. C’est le cas des prix de l’Association des journalistes automobiles du Canada (AJAC) qui reconnait, comme le Guide, des gagnants dans plusieurs catégories et couronne un quatuor identique pour la voiture, l’utilitaire, le design et la technologie de l’année.

Ces prix sont décernés depuis plus de 25 ans. Cette année, 77 journalistes, dont quatre de l’équipe du Guide de l’auto, ont mis à l’épreuve 56 nouveaux modèles dans onze catégories différentes. Les résultats ont été annoncés après trois jours d’essais comparatifs directs menés fin octobre et on peut les consulter en grand détail sur le site de l’AJAC en cliquant sur les onglets « Voitures canadiennes de l’année » et « Résultats des votes »’.

Il y a aussi, depuis trois ans, un groupe qui se nomme « Jury canadien » et qui rassemble dix journalistes, dont trois du Québec. Parmi eux Gabriel Gélinas de l’équipe du Guide. Ce jury ne remet qu’un seul prix toutes catégories et pas nécessairement à un nouveau modèle.

En regardant un peu plus loin, le prix de la Voiture européenne de l’année jouit d’un prestige certain depuis plus de 40 ans et le journaliste ontarien Gerry Malloy a créé des prix mondiaux qui sont de plus en plus connus depuis leur apparition en 2005.

Indépendants à tout prix

Sur notre continent, les prix indépendants les plus prestigieux sont les prix nord-américains, connus surtout par l’appellation North American Car and Truck of the Year Awards. Un prix pour les voitures et un autre pour les camions et autres utilitaires, remis par un groupe de 50 journalistes, dont cinq Canadiens. Un 10 % qui est proportionnel aux populations relatives des deux pays. J’écris « prix indépendants » parce que ce groupe est entièrement autofinancé. Chaque journaliste doit expédier son chèque de 150 $US chaque année.

Les Québécois sont plutôt bien représentés à ces prix nord-américains puisque Denis Duquet et moi sommes membres du jury depuis le début, en 1994, et que Jacques Duval s’y est joint après la fin de son mandat comme porte-parole de Ford. Pas de collègues mexicains, par contre. Du moins pas encore. Ce serait pourtant logique avec l’accord de libre-échange mais bon, ce n’est pas encore le cas.

De plus, cette année, je me suis retrouvé dans l’équipe de direction des prix nord-américains qui compte six membres. C’était une deuxième invitation que j’ai acceptée, curieux de voir comment fonctionne ce programme de l’intérieur. Je fais également partie du groupe de direction des prix de l’AJAC depuis quelques années. Les collègues des deux groupes sont évidemment au courant et n’y voient aucun problème.

De toute manière, les deux programmes sont très différents. Les prix de l’AJAC sont remis à la suite d’essais comparatifs simultanés, menés au même endroit, comme je le mentionnais plus haut. Pour les prix nord-américains, chaque journaliste est responsable de mettre tous les modèles en lice à l’essai et dispose ensuite de 25 points à répartir à sa guise entre les plus méritants. On peut accorder un maximum de 10 points à un seul modèle. Simple.

Tous les membres du jury ont respecté les deux premières échéances. Il fallait d’abord avoir payé sa cotisation le 5 décembre et soumettre ensuite son premier bulletin de vote au plus tard à 17 h vendredi dernier, le 9 décembre. Ces échéances sont strictes. Si on en rate une seule, on ne fait tout simplement plus partie du jury l’année suivante.

Première sélection

Avant d’en arriver là, le jury des prix N.A. a d’abord dû dresser la liste des aspirantes à partir d’un groupe de 32 candidates potentielles aux premiers jours d’octobre. On nous demande d’en choisir idéalement douze avec un gros maximum de 15, mais on s’est quand même retrouvé avec une liste de 17 modèles. Côté camions et compagnie aucun problème puisque la liste de départ ne comptait que sept noms cette année.

La liste des candidates au prix de la Voiture nord-américaine de l’année allait comme suit : Audi A6 et A7, Buick Verano, Chevrolet Sonic, Chrysler 300 et 300 SRT8, Fiat 500, Ford Focus, Hyundai Accent, Hyundai Elantra et Veloster, Kia Rio et Rio 5, Scion iQ, Subaru Impreza, Toyota Camry et Prius V en plus des nouvelles Volkswagen Beetle et Passat.

Les modèles suivants allaient se disputer le prix du « Camion » de l’année : BMW X3, Honda CR-V, Land Rover Range Rover Evoque, Mercedes-Benz Classe M, Mini Countryman, Nissan Quest et Saab 9-4X. À voir cette liste, vous comprendrez pourquoi le nom camion est placé entre guillemets un peu plus haut et pourquoi on en viendra inévitablement à glisser le mot « utilitaire » dans l’appellation de ce prix. Aucun de ces véhicules n’est effectivement un camion ou même une camionnette.

Mission plutôt dingue

Il ne restait plus qu’à essayer correctement toutes ces merveilles. La belle affaire! Comme chaque année, j’ai détaillé les deux listes pour cocher d’abord les noms des modèles déjà essayés. Il en restait vraiment beaucoup. Les « premiers contacts » où l’on conduit sur des routes soigneusement choisies par les constructeurs ne valent certainement pas les essais menés en succession sur des routes qu’on connait parfaitement.

De toute manière, je tiens toujours à faire mes propres mesures d’accélération, de reprises et de freinage. De plus, le trajet aller-retour vers la route privée où je vais faire ces essais en toute sécurité, armé de mon fidèle VBox Mini, m’en apprend souvent beaucoup sur le comportement, le roulement, le confort et les contrôles de chacune de ces machines.

Dès mon retour de la semaine du TestFest de l’AJAC, fin octobre, je me suis attelé à la tâche en multipliant courriels et coups de téléphone aux constructeurs. Comme d’habitude, j’ai pu échanger plusieurs véhicules d’essai avec Denis Duquet qui habite la même rive. Ça aide énormément parce qu’à de rares exceptions près nous devons aller chercher et ramener nos véhicules d’essai alors que nos collègues américains se les font généralement livrer à domicile.

Je me suis même tapé deux voyages d’une journée à Toronto pour y essayer la Buick Verano et la berline Kia Rio que je n’aurais pu conduire à temps chez nous autrement. Pas de mesures de performance pour ces deux-là, par contre. Ça fait moins jet set, mais j’ai également traversé la ville d’un bout à l’autre à quelques reprises en métro et pris les autobus bleus de la STM pour passer d’une voiture à la suivante.

Tout ça pour ça

Résultat : 21 essais bouclés de la fin octobre aux premiers jours de décembre. Lesquels venaient s’ajouter aux dix essais déjà complétés à cette date. Le total dépasse le nombre des véhicules en lice parce que dans plusieurs cas, j’ai essayé différentes versions et motorisations. Deux Ford Focus par exemple : berline à boîte automatique et hayon à boîte manuelle. Deux Mini Countryman aussi (Cooper et Cooper S turbo), deux coupés Hyundai Veloster (boîte à double embrayage automatisé et manuelle) et les trois motorisations de la nouvelle Volkswagen Passat.

Tout ça pour me retrouver au matin du 8 décembre, la veille de l’échéance, à préparer et expédier mes bulletins de vote dûment remplis aux bureaux de la firme comptable KPMG à Detroit. Toute cette agitation, des milliers de kilomètres de conduite et une pile de factures pour l’essence et le diesel seulement pour aligner quelques chiffres à côté du nom d’une poignée de modèles.

L’exercice m’a semblé moins pénible cette année. Les choix sont venus facilement et paraissaient évidents, mais il est toujours frustrant de songer par la suite aux autres modèles dont on aurait voulu souligner quand même les qualités. À mes yeux, pas de révolution cette année côté voiture. Mes choix ont été purement rationnels. J’ai trouvé une assez belle surprise côté « camion », par contre.

Je n’ajoute rien. De toute manière, pour la première fois cette année, les votes de tous les membres du jury seront affichés dans le détail sur le site des prix nord-américains à l’adresse www.northamericancaroftheyear.org.

En revoyant la masse incroyable de déplacements, de démarches et de boulot qu’exige la participation à ce vote, je vais certainement essayer de convaincre mes collègues américains qu’on peut faire mieux en faisant autrement. Parce que ça marche.

***Dernière heure*** Le jury vient tout juste de dévoiler les finalistes. Voir l'article complémentaire.

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