Ferrari 458 Spider 2012 - Découverte et magistrale

Conduire une nouvelle Ferrari au pays où elle a été créée, c’est le summum pour un journaliste automobile et le rêve de tout passionné qui se respecte. J’ai pu m’offrir les deux simultanément au lancement international de la Ferrari 458 Spider quelques jours après son dévoilement au Salon de Francfort. Le gros lot, quoi.

La Spider est la version décapotable du coupé 458 Italia qui collectionne prix et louanges depuis ses débuts comme modèle 2010. Elle devient aussi la première voiture à moteur central coiffée d’un toit rigide rétractable. Ses devancières chez Ferrari avaient toujours été couronnées de toits souples, y compris la F430 qui l’a précédée sur l’arbre généalogique de ce constructeur de légende.

Le plus étonnant est de découvrir que le toit rigide de la 458 Spider est plus léger que la capote souple de la F430 Spider de 25 kilos. Il faut dire qu’il est en aluminium comme le reste de la 458 Spider, plus lourde que le coupé de seulement 50 kg alors que l’embonpoint de la F430 Spider était de 70 kg. La conception du toit s’est amorcée en 2004, en parallèle avec le développement de la California qui devint la première Ferrari à toit rigide rétractable en 2009.

Solution simple et brillante

Les designers et ingénieurs se sont inspirés du toit de la 575 Superamerica, produite en série limitée. Le principe est remarquablement simple : on appuie sur un bouton, un panneau s’ouvre derrière la cabine, les deux sections du toit se séparent et font un salto arrière de 180 degrés pour se déposer l’une sur l’autre, à l’horizontale dans un mince compartiment au-dessus du moteur. Le panneau se referme et le tour est joué en seulement 14 secondes.

Il faut que la Spider soit immobile, par contre. Pas question de décapoter en roulant comme certaines. Le mécanisme est silencieux, merveilleusement simple et les panneaux repliés occupent un volume de seulement 100 litres alors que les toits de ce type bouffent habituellement de 200 à 300 litres.

Entre les deux renforts carénés qui tiennent lieu d’arceau de sécurité derrière les sièges, une glace se soulève d’environ sept centimètres. Les essais en soufflerie ont démontré que c’est la hauteur idéale pour le minimum de turbulence. C’est vrai, mais on peut quand même la relever encore ou l’abaisser complètement. Le confort et le plaisir de rouler à ciel ouvert sont complets, même à très grande vitesse.

De grande lignée

La 458 Spider est une des plus belles décapotables à toit rigide, mais n’a pas l’élégance fluide du coupé. Pas de grande lunette non plus pour voir les culasses rouges du moteur qui est caché aux trois quarts par le compartiment du toit. Pour la même raison, il a fallu déplacer les prises d’air du moteur vers l’arrière. L’aérodynamique a quand même été soignée et la partie arrière semble avoir été sculptée par le vent. Le coefficient de traînée de 0,33 est identique à celui du coupé et la Spider profite des mêmes astuces aérodynamiques, mais sa vitesse de pointe annoncée est de 320 km/h contre 325 km/h pour l’Italia.

La Spider a été dessinée chez Pininfarina et son style est pur Ferrari. Il y a quelque chose de l’Enzo dans son profil quand le toit est en place et de l’arrière aussi. Je vois aussi la 206 et les fabuleuses P3 et P4 dans ses flancs lisses et arrondis. Même la 246, la 308 et ses suivantes dans les parois effilées qui encadrent la lunette arrière. Elle est en bonne compagnie.

La mécanique est tout aussi noble. Le moteur est le même V8 à double arbre à cames en tête et injection directe de 4,5 litres que le coupé. Ses 570 chevaux à 9 000 tr/min sont un record de puissance spécifique à près de 127 chevaux par litre. Le couple est de 398 lb-pi à 6 000 tr/min et il est transmis aux roues arrière par une boîte de vitesses à 7 rapports avec double embrayage robotisé fabriquée par Getrag et programmée par Ferrari.

Il y a trois boutons ronds sur la console pour le mode automatique, la marche arrière et le mode « départ-canon ». Appuyez sur le troisième et Ferrari promet le 0-100 km/h en moins de 3,4 secondes comme le coupé, malgré les kilos en plus. La boîte est à peu près parfaite. Elle passe les rapports en douceur en traversant un village italien à 40 km/h ou vous plaque le dos au fond du siège à chaque fois que vous tirez sur la manette en fibre de carbone à droite du volant quand l’aiguille touche 9 000 tr/min sur le grand cadran jaune droit devant. Les changements sont précis, secs, instantanés. En rétrogradant aussi. Le beau plaisir.

Un guépard sur ses terres

Les gens de Ferrari avaient tracé un itinéraire d’environ 300 kilomètres pour la journée d’essai au volant de la 458 Spider. Nous allions donc la conduire sur les routes d’Émilie-Romagne où elle a été développée et peaufinée par les pilotes d’essai du Cavallino Rampante, le jeune Raffaele De Simone et le légendaire Dario Benuzzi.

Départ de l’hôtel près de Reggio nell'Emilia, à une quarantaine de kilomètres de Maranello, le fief de Ferrari. Direction la côte ligurienne sur la Méditerranée, tout près des carrières de marbre de Carrara pour le lunch. Un serpentin de routes étroites et sinueuses qui franchit les monts Apennins le matin et un ruban d’autoroute qui les découpe en sens inverse l’après-midi.

Nos hôtes ont probablement voulu ménager les estomacs parce que l’avant-midi a été assez intense, merci. On a quand même triché au retour, cartes et système de navigation à l’appui, pour faire le maximum en conduite et essayer deux ou trois choses. Je roulais avec Jim Kenzie, camarade de longue date, qui a signé les textes sur la Ferrari FF et l’Aventador de Lamborghini dans le plus récent Guide de l’auto.

Nous nous sommes payé, entre autres, trois fois les longues courbes ultrarapides de l’autoroute A15 près de Berceto dont nous avait parlé Matteo Corte de Ferrari. Au point de détraquer le système de péage de l’autoroute à force d’entrer et de sortir. Ça valait le coup. La direction des 458 est d’une rapidité inouïe. Deux tours de volant seulement d’une butée à l’autre. Un rapport d’environ 11,6:1 alors que la norme est de 16 à 18:1 pour une sportive à moteur central.

Si Ferrari peut se le permettre, c’est grâce à la stabilité de la suspension arrière à bras multiples des 458 selon Matteo Lanzavecchia, directeur du développement technique à Maranello. Sur les longues courbes rapides, la Spider reste plaquée au bitume, mais il faut effectivement braquer doucement tellement elle veut tourner. À l’inverse, on s’habitue vite à tailler les virages les plus serrés sur route sinueuse en croisant les avant-bras sans lâcher le volant même une fraction de seconde.

Personnalités multiples

C’est là que le choix de regrouper un maximum de contrôles sur le volant des 458, comme sur celui d’une Formule 1, prend tout son sens. On y retrouve les touches et les boutons pour les essuie-glaces, les phares de route, les clignotants, le réglage des amortisseurs pour les routes bosselées et un gros bouton rouge pour lancer le moteur. Pas évident au début, mais il vaut largement la peine de s’y habituer.

Parce que la 458 Spider partage les mêmes éléments mécaniques que le coupé et profite des mêmes systèmes de conduite de pointe : antipatinage, antidérapage, antiblocage, différentiel autobloquant électronique, amortisseurs. Leur l’intégration est totale et leur interaction remarquable. La baguette du chef d’orchestre, la baguette magique, c’est le manettino, un bouton rouge placé sur le volant qu’on peut régler sur cinq positions.

La position Wet commande les réglages les plus souples et progressifs. Nous avons surtout roulé en mode Sport où les réactions sont plus vives, mais sans excès. La 458 Spider est nettement plus nerveuse et ses réactions plus abruptes en mode Race. Presque trop pour la route. Ça vaut pour le son de l’échappement qu’on a d’ailleurs modifié pour le plaisir des oreilles sur la Spider. L’effet est extraordinaire est le son, sublime en pleine accélération. Un hurlement rauque et enivrant. Personne ne fait mieux. Juré. Imaginez dans un tunnel, le toit replié...

Au retour, sur une série de virages en épingle, je me suis permis de placer le manettino en mode CT-off pour désactiver l’antipatinage et la Spider nous a offert de belles dérives de l’arrière contrôlées sans peine d’un simple coup de poignet. Nouveau plaisir, rare. J’ai remis le mode Sport juste après. La position CST-off qui coupe aussi l’antidérapage, j’ai pas osé. C’est vraiment pour un circuit seulement. Les freins au carbone installés de série sont puissants, progressifs, infatigables. J’ai cru sentir la pédale un peu plus souple après un bon sprint, mais j’ai dû imaginer ça...

Programme complet

C’est avant tout le confort de roulement de la 458 Spider qui étonne pour une sportive aussi radicalement efficace. Elle le doit à ses amortisseurs à variation magnétique BWI-Delphi, cousins de ceux qui font aussi des merveilles pour la Audi R8, mais aussi à une carrosserie solide et une suspension irréprochable dont les ressorts sont identiques à ceux de la 458 Italia, mais dont l’amortissement est un peu plus doux. La coque serait moins rigide de 30% que celle du coupé, mais il faut de vraiment vilaines crevasses pour provoquer un tremblement, une trace de flexion dans la décapotable.

La Spider ne concèderait qu’une demi-seconde au coupé sur le circuit de Fiorano, mais de toute manière, l’acheteur-type préfère rouler toit baissé, sur la route et en bonne compagnie, selon Ferrari. Il ou elle appréciera quand même que la cabine ait perdu seulement 2 millimètres de garde au toit. Notre voiture d’essai Rosso corsa, une des seize couleurs offertes, était équipée des sièges « course » optionnels plus légers qui sont impeccablement taillés et confortables.

Et je ne vous ai même pas parlé du coffre très acceptable sous le capot avant, de la caméra de marche arrière optionnelle qui n’est pas un luxe, des écrans clairs et configurables de part et d’autre du volant, du système HELE optionnel qui réduit la consommation et les émissions de gaz carbonique de 20% par rapport à une F430. Ah oui, le prix : 226 800 € (euros) chez elle en Italie. Rien d’officiel pour l’Amérique, mais la note va sans doute tourner autour des 300 000 $, avant options et taxes.

À vrai dire, le plus fascinant avec la 458 Spider, c’est l’étendue de son registre et la richesse incroyable des sensations qu’elle procure. De tous types. C’est peut-être la plus glorieuse, la plus spectaculaire expression de l’automobile et du moteur à explosion. C’est certainement la voiture la plus impressionnante et la plus envoûtante que j’aie conduite. La meilleure, en fait.

Forza Ferrari, et merci.

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