LASALLE 1930, l'ambulance du Frère André!

Même si les bulletins de nouvelles nous amènent à penser que l’être humain n’éprouve plus aucune empathie envers son prochain, il n’en est habituellement rien.  À moins d’avoir un cœur de douanier américain, la vue d’une personne malade ou blessée est insupportable.  Venir en aide aux gens dans le besoin fait donc partie des gènes humains quoiqu’on en pense!

Les ambulances existent depuis que l’homme est homme.  Au début, il fallait transporter les malades sur son dos ou sur celui d’animaux domestiques comme les chevaux ou les ânes.  Peu à peu, les techniques se sont raffinées.  L’humain, un jour, s’est dit qu’un brancard ne serait peut-être pas une mauvaise idée!  Le terme ambulance provient de "ambulant" et, jusqu’au début du XX ième siècle, désigne principalement les hôpitaux militaires ambulants.  La première intervention organisée de transport de blessés aurait eu lieu au XI ième siècle, durant les Croisades.  Les Chevaliers de Saint-Jean, aussi connus sous le nom d’Ordre de Malte, reçoivent ordre de prêter secours aux victimes des Croisades et ce, peu importe leur allégeance religieuse.  En 1792, un chirurgien français, le baron Dominique-Jean Larrey, créée des "ambulances volantes" qui viennent rapidement chercher les blessés directement sur les champs de batailles.  Encore une fois, l’être humain prime sur sa nationalité ou son grade.

Ford, Buick, Packard ou LaSalle 

Plus près de nous, les premières ambulances motorisées seraient apparues à Chicago et New York au tournant du siècle dernier.  On ne sait cependant pas de quelle marque il s’agissait mais il y a fort à parier qu’on avait pris un véhicule "stock" (lire d’usine) et transformé la partie arrière pour en faire une ambulance.  Lorsqu’on consulte l’histoire des ambulances, on se rend rapidement compte que les services ambulanciers relevaient à l’époque du département d’incendie et de police.  Jusque dans les années ’40, d’ailleurs, il n’est pas rare qu’une ambulance soit transformée du jour au lendemain en corbillard (sans doute si le blessé n’avait pu être amené à l’hôpital à temps!) ou, à l’inverse, un corbillard en ambulance.  Durant les années ’10, c’est le Modèle T de Ford qui est le plus souvent modifié pour devenir une ambulance.  Les changements apportés aux véhicules en vue d’en faire des ambulances sont pratiquement toujours fait par des entreprises spécialisées.  Plusieurs marques de voitures seront utilisées par ces entreprises pour devenir des ambulances : Buick, Cadillac, LaSalle et Packard sont les plus populaires puisqu’ils sortent des usines en configuration limousine ou familiale (station wagon), ce qui constitue une très bonne base pour des véhicules de service.

Vers la fin des ’30, l’entreprise Sayers & Scovill de Lima en Ohio (devenue Hess and Eisenhardt) crée le "high roof ambulance", soit une ambulance avec le toit relevé de six pouces, question de pouvoir transporter plus de matériel.  Les automobiles sont transformées en ambulances jusqu’au début des années ’70.  Le gouvernement américain stipule alors que pour bien protéger les blessés et transporter un médecin ainsi que tout le matériel médical nécessaire, il faut obligatoirement un camion de type I, II ou III.  Déjà, au courant de la deuxième guerre mondiale, Dodge (États-Unis) et Rover de même que  Allied (Angleterre) fournissent à leur armée respective des camions transformés en ambulances.  L’idée n’était donc pas tout à fait nouvelle.

En route pour l'hôpital ou le cimetière! 

Durant plusieurs années, Montréal aussi possédait son entreprise de modification de voitures en ambulances et/ou corbillards.  Il s’agissait de la General Auto Body Limited.  Même si nous ne savons rien de cette entreprise (il nous aurait fallu mener des recherches plus exhaustives et le temps nous manquait), elle nous aura au moins laissé un véhicule en héritage.  Et tout un véhicule!  Il s’agit d’une LaSalle 1930 transformée en ambulance.  C’est l’entreprise Georges Godin, spécialisée dans le transport de malades ou de morts, (selon l’état du patient...) qui a acheté cette LaSalle modifiée en ambulance.  Petite anecdote : Georges Godin, qui a fait faillite en 1960, était basé sur la rue Rachel.  Lorsque quelqu’un appelait pour le transport d’un malade, l’ambulance devait passer par l’hôpital, prendre une infirmière puis se rendre chez le patient.  Et aujourd’hui on se plaint du délai de réponse d’Urgence Santé!

Quoiqu’il en soit, l’ambulance dont nous parlons aujourd’hui n’est pas n’importe quelle ambulance.  Elle a déjà transporté le Frère André qui, sept jours avant sa mort, accompagnait un malade.  C’est d’ailleurs suite à une annonce classée passée par l’Oratoire Saint-Joseph que M. Hervé Fortin de Montréal, collectionneur et restaurateur de voitures anciennes, se porte acquéreur de cette LaSalle.  Mais l’ambulance quasiment sainte, garée depuis des années dans un garage de l’Oratoire, nécessite une réfection complète.  Le moteur doit être refait, la charpente et le plancher de chêne réparés et le tableau de bord rebâti.  M. Fortin peut compter sur son fils Jonathan, luthier de profession, pour le travail du bois.  Cette restauration nécessite pas moins de cinq années et M. Fortin investit environ 250 000$ dans le projet.  Mais le résultat en vaut la peine.  M. Fortin a même corrigé certaines erreurs d’ajustement faites à l’usine ou chez General Auto Body!

LaSalle et Cadillac 

Contrairement à ce qui est souvent véhiculé, les LaSalle ne sont pas des sous-Cadillac.  En fait, après avoir démonté et reconstruit sa voiture, M. Fortin peut affirmer qu’outre quelques pièces de couleur différentes ou badgées différemment, rien ne distingue une LaSalle d’une Cadillac.

L’histoire de l’ambulance recèle de nombreuses anecdotes et de plusieurs surprises.  Si, au Québec, il existe bien peu d’ambulances anciennes, il en va autrement aux États-Unis où plusieurs clubs font la promotion de ce type de véhicules (par exemple, le Professional Car Society, www.professionalcar.org).  Au Québec, M. Fortin pourrait difficilement vendre sa LaSalle à un bon prix.  Mais chez nos copains du sud, et même si le Frère André n’y est absolument pas connu, la valeur de cette ambulance triple ou quadruple.  C’est la loi de l’offre et de la demande… Et le Frère André n’y peut rien!

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